Professeur à la retraite, Astolfo (Gianni Di Gregorio) est poussé à la porte de son appartement romain que sa propriétaire souhaite récupérer. Désargenté, il décide de retourner au village de ses ancêtres dans le palais familial désormais en ruine, ultime vestige d’un patrimoine abandonné.
Sur place, il découvre qu’un marginal squatte depuis des années dans la vaste demeure. L’intrus est bientôt rejoint par un cuisinier retraité et un jeune sans emploi bénéficiant de la générosité d’Astolfo qui a de toute façon la tête ailleurs.
Depuis son retour au pays, Astolfo a en effet croisé le chemin de Stefania (Stefania Sandrelli) qui ne le laisse pas indifférent. Encouragé par ses amis, Astolfo finit par se lancer dans cette romance inattendue. Et si ce retour aux sources lui permettait de prouver qu’il n’est jamais trop tard pour tomber amoureux ?
Déménagement
Avec Seconde jeunesse, Gianni Di Gregorio, auteur de nombreux scénarios dont celui de Gomorra (2008) réalisé par Matteo Garrone, fait un pas de côté par rapport à ses films précédents. Pour ce nouveau projet, l’acteur et réalisateur a décidé de se dissocier du personnage qui porte habituellement son prénom Gianni.
Autre identité, autre lieu également car ce nouveau film abandonne, à l’instar de son personnage Astolfo, la grande ville pour se mettre au vert. Au revoir la fébrilité de Rome, bonjour le calme d’un village rural. Une délocalisation d’environ 40 kilomètres seulement qui explore la possibilité d’une nouvelle vie et d’une romance inespérée.
Autobio
Nouvel alter ego et nouveau terrain de jeu n’empêchent cependant pas Gianni Di Gregorio de puiser à nouveau dans sa vie pour alimenter cette nouvelle aventure. La demeure familiale de son personnage est inspirée de sa propre maison de campagne située dans un petit village des Abruzzes. Un lieu idyllique où il a passé selon ses dires les trois meilleurs mois de sa vie.
Le groupe qui se forme autour de l’ancien professeur fait également écho aux amis qui entouraient le cinéaste à l’époque de cette heureuse escapade rurale. Même l’appropriation d’une pièce du palais familial par le presbytère jouxtant la demeure dans le film s’inspire directement d’une expérience vécue. Une mésaventure qui vient perturber ce retour aux sources pour Astolfo.
Embrouilles et débrouilles
Gianni Di Gregorio n’exploite pourtant pas pleinement ces désagréments qui bousculent son personnage. La maison familiale abandonnée abrite un squatter ? Et bien qu’il reste ! Après tout Astolfo se souvient de lui et la demeure est bien assez grande pour deux. L’intrus ne tarde pas à être rejoint par deux autres habitants du village qui s’y retrouvent pour manger, fumer et jouer aux cartes avec l’accord bienveillant du professeur à la retraite.
De la même façon, Astolfo semble à un moment partir en guerre contre le maire corrompu et le prêtre du presbytère voisin qui, en plus de lui avoir volé une pièce, n’est pas pressé de réaliser des travaux pour empêcher sa gouttière de fuir dans la cuisine d’Astolfo. Autant de pistes de conflits qui n’aboutissent pas et se perdent au fur et à mesure du récit.
Astolfo se désintéresse en effet progressivement de ces problématiques bassement matérielles. Par esprit de générosité certainement, mais aussi parce que ses pensées sont aimantées par une rencontre inespérée. Surprenant, ce désintérêt progressif pour ce qui semblait animer le film jusque-là renforce le sentiment de liberté retrouvé par Astolfo.
Jamais trop tard
Si Seconde jeunesse délaisse volontairement ces conflits c’est pour mieux mettre en avant son véritable statut, celle d’histoire d’amour inattendue. Tout le charme du film réside dans cette rencontre entre Astolfo et Stefania – une femme de son âge, fait assez rare pour le souligner – qui vient chambouler la vie du professeur et emporte avec elle toute velléité de partir en guerre contre les ennemis désignés.
Après tout, que valent les désagréments d’une demeure en ruine qui prend l’eau face à l’espoir d’un nouveau départ ? La tendre interprétation de ce joli couple associée au cadre bucolique apportent un réponse définitive à cette question. En envoyant promener les attentes du spectateur, Seconde jeunesse assume la liberté d’une insouciance retrouvée dans les prés.
> Seconde jeunesse (Astolfo), réalisé par Gianni Di Gregorio, Italie, 2022 (1h37)