« Miraï, ma petite sœur », retour vers le futur familial

« Miraï, ma petite sœur », retour vers le futur familial

« Miraï, ma petite sœur », retour vers le futur familial

« Miraï, ma petite sœur », retour vers le futur familial

Au cinéma le 26 décembre 2018

Frustré de ne plus être le centre d’attention de ses parents depuis la naissance de sa petite sœur, Kun se rebelle contre la nouvelle venue. Un jour, il se retrouve propulsé dans un monde magique mêlant avenir et futur et croise les membres de sa famille à divers âges de leur existence. Original et poétique, Miraï, ma petite sœur explore l’immuabilité du lien familial avec une justesse bouleversante.

Kun, un petit garçon de quatre ans, se sent mis de côté par ses parents lorsque naît Miraï, sa petite sœur. L’excitation de la nouveauté fait rapidement place à l’agacement devant cette nouvelle venue qui monopolise l’attention de ses parents et l’enfant se replie peu à peu sur lui-même. Mais la vie de Kun se retrouve chamboulée par la découverte d’un arbre généalo-magique au fond du jardin où il aime se réfugier.

Le petit garçon se retrouve soudainement propulsé dans un monde fantastique où se mêlent le passé et le futur. Lors d’aventures surprenantes, il va rencontrer tour à tour ses proches à divers âges de leur vie : sa mère lorsqu’elle n’était encore qu’une petite fille, son arrière grand-père en plien force de l’âge et sa petite sœur devenue adolescente !

Miraï, ma petite sœur © 2018 STUDIO CHIZU

Un film de famille

Pour notre plus grand bonheur de cinéphile, Mamoru Hosoda continue à faire ce qu’il maîtrise à la perfection : explorer la cellule familiale dans tous ses états. Traversées par le fantastique, ses histoires sont également toujours fortement ancrées dans l’expérience personnelle du réalisateur. Si le sublime Les enfants loups, Ame & Yuki (2012) étaient un hommage à sa mère disparue et Le garçon et la bête (2015) [lire notre chronique] une fable sur l’apprentissage liée à la naissance de son fils, Miraï, ma petite sœur puise dans son expérience de père et propose une réflexion sur ce qui se transmet de génération en génération au sein des familles.

Le cinéaste a en effet été surpris lorsqu’il s’est entendu dire à ses enfants des paroles qu’il détestait entendre dans la bouche de ses propres parents. Sommes-nous condamnés à devenir nos géniteurs ? Et de manière plus générale, l’héritage familial possède-t-il ses rites invariables ?

Miraï, ma petite sœur © 2018 STUDIO CHIZU

Place au bébé !

Assez rapidement, l’arrivée de Miraï inspire le rejet chez le petit garçon qui a l’impression d’être abandonné par ses parents. L’attention demandée par ce bébé très encombrant le prive selon-lui de l’amour parental. Une impression qui n’est d’ailleurs pas complètement infondée. Cette terrible injustice met Kun en rage : il est n’est pas décidé à partager ses parents avec ce nouveau-né parasite. Mamoru Hosoda ne minimise d’ailleurs pas l’agacement du petit garçon qui prend la forme d’une réelle colère envers ses parents alimentée par l’incompréhension.

Avec une justesse étonnante, le cinéaste ne censure rien des gestes brusques du petit garçon qui complote la mise à l’écart de sa petite sœur. Mais la situation va peu à peu changer lorsque Kun découvre que son jardin est un endroit magique. À sa grande surprise, le chien de la famille ayant pris forme humaine lui explique qu’avant sa naissance c’était lui le chouchou dans la famille, puis il a été relégué au second plan. De quoi mettre les choses en perspective pour Kun qui n’est pas au bout de ses surprises.

Le génie de Mamoru Hosoda est de partir de petits riens qui sont très significatifs. Kun se retrouve ainsi impliqué dans des aventures incroyables et souvent très amusantes qui pour certaines se déroulent dans le quotidien du foyer. Ses voyages à travers le temps et l’espace sont un bel hommage à l’imaginaire enfantin. À moins que tout cela lui arrive vraiment. Impossible de le savoir avec certitude dans l’univers magique de Mamoru Hosoda.

Miraï, ma petite sœur © 2018 STUDIO CHIZU

L’éternel héritage

Grâce au jardin magique, Kun va rencontrer des membres de sa famille à divers âges de leur existence. Des tête-à-tête surprenants qui vont profondément modifier sa façon d’envisager sa famille. Mais ce saut dans le temps n’est pas un simple effet de scénario : il permet au cinéaste de capter ce qui se transmet de génération en génération. À travers les voyages temporels du petit garçon, c’est la nature même de l’héritage familial qui est mis à jour.

En créant des rencontres impossibles entre les membres de la famille, le réalisateur instaure un dialogue magique avec les anciennes générations qui peuvent ainsi transmettre leurs expériences. Et en projetant Kun dans un futur — réaliste, probable ou fantasmé —, le petit garçon est confronté comme par magie à une petite sœur devenue son aînée et qui peut alors s’exprimer et se défendre, chose évidemment interdite au bébé qui partage actuellement sa vie.

Cette petite sœur parallèle est la clé de voûte d’un monde fantastique qui va permettre au jeune Kun de découvrir sa famille en abolissant la frontière de la différence d’âge. Et à travers cette transmission, le petit garçon va pouvoir apaiser sa colère et trouver sa nouvelle place au sein de la cellule familiale, celle d’un grand frère aimant.

Nouveau joyau dans la filmographie très familiale de Mamoru Hosoda, Miraï, ma petite sœur évoque avec grâce cet héritage intangible qui se transmet de génération en génération. Un œuvre tendre et d’une pertinence remarquable.

> Miraï, ma petite sœur (Mirai no Mirai), réalisé par Mamoru Hosoda, Japon, 2018 (1h38)

Miraï, ma petite sœur (Mirai no Mirai)

Date de sortie
26 décembre 2018
Durée
1h38
Réalisé par
Mamoru Hosoda
Avec
Jaden Waldman, Victoria Grace, Rebecca Hall, John Cho
Pays
Japon