Masquée, costumée, collants moulants, chaussettes mauves et paire de Reebok, Mamika est de retour. Et désormais, il faut l’appeler Super Mamika. La célèbre grand-mère est aujourd’hui une super héroïne. A la ville, c’est Frederika Golberger, une baronne hongroise qui soufflera bientôt ses 94 printemps. Et cette nonagénaire en cape vit une histoire d’amour avec son petit-fils Sacha Goldberger, photographe. « Au départ, c’était une blague. Je lui ai demandé de présenter mon travail sur mon site », raconte-t-il.
Drôle, décalée, montrant l’image d’une vieillesse casse-cou et dynamique, Mamika, « petite mamie » en hongrois, n’a pas tardé à charmer son monde. Avec son inénarrable casque de scooter vissé sur la tête, cette grand-mère adorable qui n’hésite pas à se mettre en scène peut se vanter de posséder un pouvoir comique hallucinant. Le duo qu’elle forme avec son petit-fils Sacha est en plus très touchant. Il n’en fallait pas davantage pour lancer le phénomène Mamika, incroyable « success story ». « J’ai pris ma grand-mère en photo. On a fait une première expo, j’ai sorti un bouquin, on a continué les expos. C’est une aventure qui ne s’arrête jamais. Il arrive toujours l’image de plus, celle qu’on ne devait pas faire, et finalement… », explique Sacha Goldberger.
Super Mamika a son héritière
Actuellement exposée à la Galerie d’en face, Mamika chausse ses Reebok accompagnée de ses camarades de jeux, Papika et Dark Papouka, à la ville le père de son meilleur ami et un ancien déporté, dont Sacha est devenu très proche. « Papika, c’est le mari, et Dark Papouka, c’est l’amant. Parce que ma grand-mère a tout de même été mariée quatre fois, ce n’était pas possible de la laisser seule ! » De nouveaux personnages apparaissent également. Beurk le chien, « parce qu’il y a toujours un chien », Dark Vador, « le meilleur ami de Dark Papouka ». Et Super Ava. « C’est une note d’espoir, le symbole de la transmission. »
Super Mamika devra passer le flambeau. Elle a déjà son héritière, la ville peut dormir tranquille. Sacha Goldberger ne nie pas la réalité avec cette image sublimée de sa grand-mère adorée. Elle est âgée de 94 ans et vit ses dernières années, avec un indécrottable panache ! « J’ai toujours beaucoup parlé de ma grand-mère. Et je voulais pouvoir parler d’elle après sa mort. Aujourd’hui, je peux en parler à plein de gens, beaucoup la connaissent, et c’est une façon de la rendre immortelle. »
Des visages ridés, des regards vifs
S’attendaient-ils à un tel succès ? A cet effet « Mamika », qui s’est emparé de nous ? Cet attachement qu’ont pour elle tous ceux qui suivent ses aventures ? « Non, ça dépasse tout ce à quoi on pouvait s’attendre. Ma grand-mère aime que les gens viennent la voir, parlent avec elle, ça lui fait très plaisir. Mais sinon, au quotidien, elle s’en fiche un peu, ça n’a pas changé nos vies. »
Ils sont inattendus, ces super héros, photographiés dans des situations loufoques, absurdes et drôles. Visage ridé mais le regard vif et pétillant. Tous se plient de bon cœur à la mise en scène échafaudée par Sacha. Chacun joue son rôle. « Donner à des personnes de cet âge la possibilité de se mettre en costume et de faire des conneries alors qu’ils ont 85 ans, qu’ils savent que l’image à la fin ne sera ni ridicule ni moche, non seulement ils s’y prêtent de bon cœur, mais en plus ils se révèlent être de très bons acteurs… »
La bande de super héros, octogénaire et nonagénaire, avait besoin de New York pour que l’ambiance soit vraiment parfaite. New York, le berceau des super héros. « Je voulais que ce soit comme un retour au source. Les juifs d’Europe centrale qui ont fui le nazisme et créé les super héros de l’Age d’Or étaient basés à Brooklyn. »
Fier de sa grand-mère, fier qu’elle ait sauvé des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale, Sacha Goldberger voulait aussi rendre hommage à Frederika en la photographiant dans un costume de personnage courageux. Les immeubles de briques, les grandes artères, une vieille Dodge noire, le décor est impeccable pour Mamika & Co. Une drôle de clique, immobile et loufoque, dans un New York désert et intemporel.
L’exposition « Les Darks » montre 17 tirages extraits de la fin du livre Mamika & Co, avec Mamika, Papika, Dark Papouka mais aussi Dark Mamika. « Ma grand-mère est très drôle, mais elle a aussi un côté plus sombre, plus dur. » C’est beau, un petit-fils inspiré par sa grand-mère, culottée et audacieuse.
> Mamika & Co, grande petite grand-mère et ses futurs anciens amis, Sacha Goldberger, éditions Place des Victoires, novembre 2012.
> Mamika & Co, la Galerie d’en face, jusqu’au 25 janvier 2013, 7 rue Paul Louis Courier, 75 007 Paris.