James Dean, hors-champ

James Dean, hors-champ

James Dean, hors-champ

James Dean, hors-champ

Au cinéma le

Icône, mythe, légende… Que peut-on dire de James Dean une fois qu'on a dit ça ? Citazine a posé la question à Jean-Noël Coghes, co-commissaire d'une exposition sur l'acteur, organisée à la Boutique Renoma, à Paris.

Il aurait eu 80 ans le 8 février dernier. Trois films, une belle gueule, une réputation de rebelle et une mort accidentelle tragique à 24 ans, en 1955. Un génie fauché par la vie ! Tous les éléments sont réunis pour faire de James Dean une légende hollywoodienne, comme on aime les créer. Mais la légende est une bien petite case. Pas vraiment de place pour savoir qui est James Dean, au-delà de l’icône immuable et intouchable. Qui a-t-il derrière le beau visage ? A quoi aspirait-il ? Trois films géniaux, et puis quoi ?
A la galerie Renoma se tient, depuis le 9 février, une exposition sur le rebelle de
La Fureur de vivre. Les deux commissaires de l’exposition sont le styliste Maurice Renoma, grand fan de James Dean, et Jean-Noël Coghe, journaliste écrivain, auteur de Jimmy the Kid, James Dean Secret. L’occasion d’évoquer, avec lui, un James Dean, sans la camisole du mythe.


On a déjà beaucoup parlé de James Dean. Pourquoi organiser une exposition ?

Le but de l’exposition est de montrer qu’en dix-huit mois, il a fait trois films qui ont bousculé le cinéma et l’histoire de la jeunesse. Il a été un détonateur pour le rock ‘n roll et l’explosion de la jeunesse. (La Fureur de vivre, de Nicholas Rey, sorti en 1955 ; A l’est d’Eden de Elia Kazan, 1955 ; Géant de George Stevens, 1956).

Qu’est-ce qui le rend si important ?

Jazz, musique classique, blues, rock… Il détestait les cases. Il avait tout compris avant de savoir les choses. Il mettait le doigt sur tout, il sentait les choses.
A 20 ans, il avait compris la musique, du moins tout appréhendé. Avoir 20 ans en 1965, ce n’est pas la même chose qu’aujourd’hui !
Il jouait à l’instinct sans intellectualiser et était toujours juste. George Stevens lui a refusé des choses sur le tournage de Géant (sorti en 1956, un an après la mort de James Dean, NDLR), alors qu’au montage, il s’est rendu compte qu’il avait raison.

On a l’impression que tout était facile pour lui. Il n’avait pas besoin de travailler ?

Il n’a fait que travailler ! Au lycée, à Fairmount (Indiana), il suit déjà des cours de théâtre. A 19 ans, il part à Los Angeles et entre à l’University of California (UCLA) où il fait des études de droit, forcé par son père qui ne voulait pas qu’il entre au conservatoire. Mais il choisit cette université parce qu’il pouvait y suivre, en parallèle, des cours de théâtre. C’est à ce moment-là qu’il commence à traîner dans les studios et les castings. Il est alors repéré pour jouer dans la pub Pepsi et il fait une première apparition dans Baïonnette au canon, en 1951.
Il a énormément travaillé sur son jeu, avec l’acteur James Whitmore, une rencontre très importante pour lui. Il lui apprend la méthode Stanislavski, mise en pratique et popularisée par l’Actors Studio. C’est-à-dire que lorsqu’il rentre à l’Actors Studio, à New York, il ne fait pas une découverte !

L’école qui a formé Marlon Brando. C’était un modèle pour lui ?

James Dean ne s’inspire pas de Marlon Brando. C’est plutôt comme un grand frère. Dean n’a que 18 ans quand Brando en a 24. Il ne porte pas un blouson de cuir et des bottes de moto parce qu’il les a vus Sur les quais, Elia Kazan, 1954. Il en porte parce qu’il fait de la moto ! Par contre, James Dean fait effectivement partie de cette catégorie de personnes qui se nourrissent de leurs rencontres et des gens dont il s’entoure. A 10 ans, il observe son grand-père et arrive à l’imiter. Il était fan de Jacques Tati. Après avoir vu Jour de fête, tout de suite, il savait imiter le facteur. Personne ne raconte ça, alors que c’est bien plus important que sa bisexualité supposée.

C’est pour cela que vous avez écrit votre livre, pour en finir avec tout ce qui se répète toujours sur James Dean ?

Quand on a fêté le 50e anniversaire de sa mort, je me suis dit que j’allais faire un livre sur James Dean. Mais j’ai attendu parce que je savais que tout le monde allait le faire. Je voulais prendre le temps de chercher des choses que les autres n’avaient pas encore trouvées. Tout le monde est intéressé par sa bisexualité, mais ce n’est pas important ! On parle de ses trois films mais parle-t-on des rapports qu’il entretenait avec les réalisateurs ? Est-ce qu’on sait qu’il a joué dans deux pièces de théâtre, dans une trentaine de pièces télévisées ? Sur le tournage de Géant, il passait son temps sur le plateau, même quand il ne jouait pas. Il observait, se tenait en haut de l’échelle et prenait des notes sur Butch Cassidy. Il voulait être réalisateur, c’est pour ça qu’il s’était entouré de photographes. Et les types de la Warner avaient repéré son envie de passer derrière la caméra. Ils le pressentaient pour tourner Butch Cassidy et le Kid !

La classe d’un McQueen, d’un Newman !

Il adorait la photographie, le dessin et la peinture…

Il a toujours dessiné. Ses dessins sont devenus très lugubres, bizarres, à partir du décès de sa mère, en 1940. Quand il ne joue pas, il dessine. Il a peint Miles Davis. Il sculpte aussi. Il se passionne pour les arts en général. Et comme c’est un vampire et qu’il veut apprendre, il fréquente des gens qui ont une culture forte pour s’en imprégner lui-même.
Et bien sûr, il fait de la course automobile. Mais ce n’est pas un acteur qui court à ses heures perdues. Il est accepté dans le milieu comme un vrai coureur. Il est légitime. James Dean est un personnage qui a mille facettes, c’est pour ça qu’il est si passionnant !


Ce n’est pas le rebelle qu’on imagine ?

Non, ce n’est pas le rebelle en blouson de cuir et en bottes de moto, voulu par Johnny Halliday. C’est beaucoup plus subtil que cela. C’est un révolté qui a tout compris ! Il connaît le système et, même s’il est en désaccord avec ce système, joue le jeu et l’utilise pour arriver à ses fins. Une scène de Géant montre bien qui est James Dean. Dans le film, la famille Bénédict essaie de lui racheter son lopin de terre, où se trouve tout le pétrole. James Dean semble se laisser embobiner, il se laisse approcher. Mais au dernier moment, il dit : « Non ». C’est ça James Dean. Un véritable fouteur de merde, mais parce qu’il remet les choses en question. C’est un empêcheur de tourner en rond !

Il aurait sans doute perdu de sa superbe en vieillissant, comme Marlon Brando, non ?

James Dean est un quaker, c’est-à-dire qu’il savait quelle importance donner aux choses. Il n’est pas "bling-bling". Beulah Roth, la femme du photographe Stanford Roth – couple avec lequel il devait partir à Paris pour rencontrer Cocteau et Colette – dira de lui combien il était étonnant de voir ce bel homme, adulé par les femmes, à qui tout réussissait, qui avait de l’argent, vivre très simplement, dans un petit logement. Il ne se serait jamais laissé corrompre. James Dean, c’est un McQueen, un Newman. C’est ça, la classe !

 

Jimmy the kid, James Dean Secret, Jean-Noël Coghe, Hugo Doc, 2007.

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