Un jour, il lâche le mot "Bomeur" pour se décrire auprès de ses potes. Il amuse la galerie qui en redemande. Plus tard, attablé à la terrasse d'un café parisien, un jour de chômage comme un autre, Nathanaël Rouas rédige une description du bomeur. "Je le poste sur facebook, ça fait marrer mes potes, ils partagent, me demandent de continuer…". Il a déjà écrit des courts-métrages avec ses copains, et a aussi travaillé sur le deuxième one man show de John Eledjam. Il a le sens de la formule, la preuve avec la base line du TumblR, "analyses plus ou moins sociobranlodémographiques (et plus ou moins autobioraphiques) sur la vie des bobos chômeurs".
Rapidement son TumblR, "sorte de stand-up virtuel sur le thème du chômage" fait parler les journalistes qui découvrent avec appétit cette génération qui n'a connu que la crise et fait la maligne sur les réseaux sociaux. Le Bomeur, ce personnage fictif, devient le symbole d'une nouvelle catégorie sociologique. Celle des bobos de 30 ans, qui se retrouvent au chômage, avec une allocation pépère pour voir venir, mais tout de même, chômeur, ça manque de classe. Pourtant, sur Facebook, ces mêmes bobos chômeurs bataillent, jour après jour, pour prouver et conserver leur coolitude.
Nathanaël Rouas, la petite tentaine, n'est plus un bomeur. Il a créé son agence de communication, 5duMAT. Pour répondre à notre questionnaire de Proust, il a renfilé son costard de jeune bobo chômeur qui voulait rester cool, coûte que coûte. Et si le bomeur et son créateur sont parfois proches, c'est bien le bomeur et non le créateur qui nous dit tout.
Les mots qui me définissent.
Impulsif, prise de tête, recul, autodérision, chômeur, bobo.
Les héros de fiction qui influencent ma coolitude.
Rocky Balboa, parce qu’il sort de nulle part, arrive à tenir tête au plus grand des plus grands et finit par se faire aimer de tous, même des « méchants russes » qui l’applaudissent en scandant son nom. Il arrive toujours à se relever ce mec.
Le défaut que je préfère chez un Parisien.
L’assiette de fromages à 16 balles qu’on te propose quand « ah désolé mais les cuisines sont fermées ».
Mon plus gros atout.
Penser que le plus important n’est pas le savoir-faire mais le faire savoir.
Mon plus gros défaut.
Penser que le plus important n’est pas le savoir-faire mais le faire savoir.
Ma journée type.
Lever 10h27. Check facebook, gmail, instagram, So Foot. Douche. Déjeuner chez Slize. Sieste. Apéro. Apéro. Nuba.
Ma plus grande fierté.
Mon ancien boulot.
Mes potes.
Il y en a pas mal, je fonctionne par bande de potes. Je pourrais en citer une vingtaine que je considère comme très proches.
Le lieu branché où je voudrais avoir mes entrées à vie.
Mon régime alimentaire.
Mauresque (un cocktail à base de Pastis ndlr) , DooWap, Kiri et Tomates-Mozza.
Mon uniforme type de mec cool.
Jean A.P.C., running Nike et T-shirt blanc
Les délimitations de mon territoire géographique.
Tout Paris. Enfin tout Paris sauf le 15ème, Le 16eme, Le 5ème non plus… le 6ème non plus, ni le 7ème, ni le 8ème en fait.
Mon mode de transport.
Le scooter. Toujours. Pour pouvoir rejoindre n’importe qui et répondre « ok » à n’importe quelle proposition de sortie de mes potes.
Mon SMS type.
Kestuf ? (langage SMS qui signifie : "tu fais quoi ?" ndlr)
Mon personnage sur les réseaux sociaux.
Comme tout le monde, ne montrer que la partie « cool » de moi. Tout le monde contrôle son image de manière consciente ou inconsciente sur les réseaux. J’ai jamais vu un mec ou une fille pleurer sur une des ses photos… alors qu’en 10 ans de Facebook, y’en a quand même pas mal qui ont du pleurer dans la vraie vie non ?
Mon personnage aux terrasses des cafés.
Le mec qui bosse sur un projet, qui tape sur son mac, mais qui peut tout arrêter au moment où il croise un pote qui passe devant la terrasse.
Mon personnage, tout seul chez moi.
Je suis rarement chez moi. Rester seul m’angoisse. Seul à regarder une série, j’ai l’impression de perdre mon temps.
Ma photo la plus cool sur Instagram.
Le programme d’un club où je mixe avec mes potes
Mon statut le plus cool sur Facebook.
"Ça fait quand même 4 ans que les participants de TopChef s'en sortent en faisant des chips de topinambour et des makis de poule au pot”
La fois où je me suis le plus senti comme un gros loser.
Le soir où l’on a appris la liquidation judiciaire de l’agence dans laquelle je bossais et que pour la première fois, je devais répondre "je suis chômeur" à une fille qui me demandait ce que je faisais dans la vie.
Mon pire dimanche soir.
Tous les dimanches soirs sont nos pires dimanche soir. Ça doit venir de l’enfance, quand on savait qu’on allait attaquer une semaine de contrôles de maths et d’histoire géo.
Mon mensonge le plus fréquent.
"Je suis sur un projet là, mais je t’en parlerai quand ça aura avancé."
Ma relation avec le pôle-emploi.
Juste 4 clics une fois par mois.
Ce qu'on me reproche à tort.
D’être un glandeur ou un un mec qui "profite du système".
Mon leitmotiv.
Tout est possible.
Ce que j’ai du mal à avouer (mais que j’avoue quand même).
Que le chômage te fait vriller le cerveau.
Mon unique conseil.
Ne pas parler d’un projet avant de l’avoir réalisé. Parce que le plus souvent, les gens vous découragent, quelque soit le projet, à vous lancer. Pour réaliser ce que l’on veut, il faut savoir prendre des risques.
Ce que m’a apporté le Bomeur.
Des friend requests sur facebook.
> Le Bomeur, une vie de bobo chômeur, de Nathanaël Rouas, éditions Robert Laffont, mars 2014.