En 1999, le corps démembré d’un employé d’une carrière minière est retrouvé dispersé dans la région de la Manchourie. L’inspecteur Zhang Zili (Liao Fan) est chargé de retrouver le coupable mais doit rapidement abandonner son enquête : il s’est après blessé lors d’une interpellation des principaux suspects ayant tourné au fiasco.
Cinq ans plus tard, deux nouveaux meurtres sont commis dans la région, tous deux liés à une employée de teinturerie (Gwei Lun-Mei), épouse de la première victime. Devenu agent de sécurité, Zhang décide de reprendre du service et fréquente l’énigmatique jeune femme en espérant résoudre l’affaire.
Noirceur éblouissante
Si son propos est noir comme le charbon du titre, ce film policier brille par son esthétique irréprochable. Les personnages sont plongés dans des ambiances aux couleurs vives – vert, rouge, jaune – qui subliment des plans parfaitement maitrisés. Ce « feu d’artifice en plein jour » (titre d’origine du film) fascine également par son atmosphère sombre, renforcée par une bande son soigneusement travaillée.
L’accompagnement musical sait se faire discret pour mettre l’accent sur l’environnement sonore, envoûtant et parfois angoissant. L’alchimie parfaite entre la mise en scène précise et ce travail sur le son offre des séquences hypnotiques à l’image de celle de la patinoire qui nous captive avec le simple bruit de patins sur la glace. Présenté en compétition au Festival international du film de Berlin, Black Coal a su convaincre le jury : le film est reparti avec l’Ours d’or du meilleur film et l’Ours d’argent du meilleur acteur pour Liao Fan.
Intrigue conventionnelle
Si le film impressionne avec son style visuel inventif, l’intrigue est plus traditionnelle. L’histoire se concentre rapidement sur le couple formé par l’ex-policier Zhang et l’insondable jeune femme et poursuit son cours naturel sans connaitre de grands rebondissements. La relation improbable qui se noue entre ces deux êtres solitaires détourne progressivement l’attention de l’enquête en cours, au risque de perdre le spectateur. Certains auront peut-être du mal à s’attacher à ce couple étrange mais leur attitude distante correspond à l’atmosphère du film, froide comme la glace de la patinoire qu’ils fréquentent.
Black Coal se détourne des thrillers modernes aux retournements de situations surprenants pour s’inscrire dans la lignée des films noirs classiques où la destinée des individus importe autant, sinon plus, que l’affaire criminelle. Il n’est pas étonnant d’entendre le réalisateur Diao Yi ‘nan citer des films intemporels tels que Le faucon maltais (1941), Le troisième homme (1949) et La soif du mal (1958) comme sources d’inspiration du scenario et de son approche visuelle.
Film noir par excellence, Black Coal nous plonge dans un univers très sombre, magnifié par une mise en scène captivante. Si l’intrigue, classique, ne surprend pas, la beauté formelle de ce film de genre assumé devrait séduire les amateurs de belles images fascinantes.
> Black Coal (Bai ri yan huo), réalisé par Diao Yi’nan, Chine, 2014 (1h46)