« Vice-versa 2 », retrouvailles émotionnelles exaltantes

« Vice-versa 2 », retrouvailles émotionnelles exaltantes

« Vice-versa 2 », retrouvailles émotionnelles exaltantes

« Vice-versa 2 », retrouvailles émotionnelles exaltantes

Au cinéma le 19 juin 2024

Riley découvre le grand chamboulement de l'adolescence. Dans sa tête, de nouvelles émotions débarquent et sèment un chaos qui l'éloigne de ses proches mais aussi d'elle-même. Près d'une décennie après un premier opus à l'ambition flamboyante, Vice-versa 2 s'impose comme une suite très réussie possédant de magnifiques trouvailles de sensibilité et d'humour. Plus mature de par son sujet du passage à l'âge adulte, ce nouveau tour de force très riche en émotions possède un écho nostalgique et un tendre regard sur la perte d'une précieuse insouciance à réanimer d'urgence.

Tout juste diplômée, Riley, 13 ans, s’apprête à connaître de grands changements dans sa vie. Le plus inattendu et déstabilisateur s’invite sous la forme de la puberté qui débarque un beau matin sans prévenir. Dans le quartier général des émotions où Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût accompagnent la jeune fille au quotidien, c’est la panique devant la restructuration qui s’annonce !

Les cinq émotions d’enfance de Riley voient débarquer Anxiété, une émotion ébouriffée porteuse de nombreux bagages que l’on imagine émotionnels. Et elle n’est pas seule ! Assaillie de nouvelles sensations inconnues, Riley va devoir s’adapter. Au risque de perdre son identité ?

Vice-versa 2 © photo Disney/Pixar. All Rights Reserved.

Retour plein d’émotions

Vice-versa 2 sort dans les salles françaises neuf ans, quasiment jour pour jour, après le génial premier opus de 2015 – lire notre critique. Autant dire que le retour des émotions anthropomorphes est attendu au tournant. Pour preuve, le record de visionnage en 24h – 157 millions ! – battu par sa première bande annonce.

Oscar du meilleur film d’animation en 2016, le premier film signé Pete Docter, réalisateur de Là-Haut (2009) et Soul (2020) – lire notre critique -, explorait les états d’âme de Riley, 11 ans, bousculée par un déménagement. Dans cette suite se déroulant deux ans plus tard, la jeune fille est confrontée à une menace bien plus terrifiante : la puberté. Vaste sujet qui vient mettre en péril l’équipe soudée de ses émotions qui tente, tant bien que mal, de protéger Riley des affres de l’existence.

À la tête de cette suite, Kelsey Mann qui réalise et a coécrit l’histoire avec Meg LeFauve et Dave Holstein. Il n’est pas un inconnu chez Disney/Pixar car il a notamment travaillé dans l’équipe d’animation de Monstres Academy (2013) et En avant (2020) – lire notre critique. Il a également contribué à l’écriture de l’amusante série Monstres & Cie: Au travail (2021) et du surprenant Le Voyage d’Arlo (2015) – lire notre critique.

Vice-versa 2 © photo Disney/Pixar. All Rights Reserved.

Toujours plus

Sans surprise, l’entrée dans l’adolescence est l’occasion d’un bouleversement complet pour Riley et les cinq émotions qui vivent dans sa tête. Alors que leur QG est en plein chantier, elles doivent faire de la place pour de nouveaux arrivants. Une première mouture du scénario imaginait que ces nouveaux collègues seraient Liberté, Amour, Passion et Force. Des sentiments, probablement trop abstraits, qui n’ont pas su trouver leur place au sein de l’aventure.

Finalement, les cinq émotions de l’enfance, Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût sont rejointes dans cette suite par Anxiété, Embarras, Ennui et Envie. Difficile de mieux caractériser la puberté que par ces émotions créatrices de frustration, de gène et d’impatience. Avec cette arrivée tonitruante,  neuf émotions doivent cohabiter dans le centre de contrôle. Autant dire que les dissensions vont rapidement apparaître sur la façon de gérer les réponses émotionnelles de Riley.

Malgré cet encombrement émotionnel propre à l’adolescence, Vice-versa 2 réussit à distribuer équitablement les rôles. Comme le premier opus, cette suite est menée sans temps mort et est illuminée d’idées malicieuses pour exprimer des ressentis complexes et parfois conceptuels. À l’instar d’une séquence minimaliste dans le premier film, cette suite surprend en manipulant l’animation 2D conventionnelle et introduit même un personnage de jeu vidéo en 3D dont les pixels apparents trahissent l’âge.

Vice-versa 2 © photo Disney/Pixar. All Rights Reserved.

Au revoir les enfants

Mais Vice-versa 2 ne se contente pas d’en faire plus avec une surenchère de personnages. Le film évite au contraire habilement le trop plein émotionnel redouté et propose des trouvailles aussi drôles que brillantes. Les clins d’œil au premier opus sont présents mais sans la tentation de totalement se reposer dessus. Le film de Kelsey Mann évite soigneusement de tomber dans la facilité et d’exploiter paresseusement les clichés de l’adolescence pour raconter quelque chose de plus profond. Le scénario de Vice-versa 2 assume toutefois la paternité de son modèle. L’arc narratif reste celui d’une réparation émotionnelle avec cette fois-ci un enjeu plus grand qu’un simple rééquilibrage d’émotions.

Lorsque les nouvelles émotions prennent le contrôle, les anciennes sont mises de côté créant la dramaturgie de cette suite. Leur quête consiste alors à reprendre la main sur les ressentis de Riley. Aux commandes, Anxiété échafaude un plan pour que Riley intègre l’équipe de hockey de ses rêves, un but qui devient une obsession. Pour cela, le sentiment anxieux pousse Riley à tourner le dos à deux amies très proches pour se rapprocher de Valentina et son groupe d’amies plus âgées.

Ces changements trop rapides et radicaux posent la question de l’identité de Riley. Vice-versa 2 interroge ainsi ce qui reste de l’enfant en chacun de nous en mettant en scène l’adolescence comme le moment de bascule. À l’instar de l’ami imaginaire abandonné dans le premier film, la puberté n’est-elle pas le point de rupture où l’on rejette l’enfant que l’on a été ? Sur fond de trahison généralisée, Vice-versa 2 explore la perte des idéaux, l’abandon des proches et l’effacement de sa singularité pour intégrer le groupe.

Vice-versa 2 © photo Disney/Pixar. All Rights Reserved.

Good feelings

La force de cette nouvelle tempête émotionnelle est la subtilité de son propos. Si Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût se retrouvent mis à l’écart, les nouveaux arrivants ne sont pas – a priori – des adversaires. D’ailleurs, Anxiété ne tarit pas d’éloges sur Joie qu’elle considère comme un modèle lors de son arrivée. Mais voilà, comme Joie, Anxiété se préoccupe – c’est le moindre de que l’on puisse dire – de l’avenir de Riley et son plan n’est pas compatible avec l’optimisme un brin naïf de Joie.

Pour les nouvelles émotions adolescentes, il faut tout reconstruire car l’enfant qu’était Riley ne peut pas plaire à ses nouvelles connaissances. Il faut grandir et vite ! Au risque de se perdre. Anxiété n’est pourtant pas une « mauvaise » émotion. Comme ses camarades, elle veut le bien de Riley et pense la protéger. Mais elle ne peut s’empêcher d’imaginer un futur évidemment anxiogène et catastrophique. Pour s’en prémunir, elle souffle à Riley des actions préventives qui finissent par ironiquement entraîner le désastre initialement redouté.

Cette idée d’émotions toutes nécessaires mais qu’il faut apprendre à maîtriser s’inscrit parfaitement dans la suite logique du premier film. Parmi les belles trouvailles de cette suite, la présence des croyances de Riley qui sont le fruit de ses souvenirs. Une fois rassemblées, elles fondent l’estime de soi de Riley qui lui permet d’avancer – ou non – dans la vie. Vice-Versa 2 joue ainsi subtilement avec l’idée d’une confiance déstabilisée lors de l’adolescence allant de pair avec la perte d’une certaine innocence de l’enfance.

Vice-versa 2 © photo Disney/Pixar. All Rights Reserved.

Avec l’arrivée fracassante d’émotions qui marquent le passage à l’âge adulte, Vice-versa 2 réussit le pari d’une suite en cohérence avec le premier opus tout en offrant de belles surprises. Toujours aussi brillant et éminemment sensible, ce nouveau bijou de Disney/Pixar émeut autant qu’il distrait. Une réussite qui a aussi l’avantage de coûter moins cher qu’une séance chez le psy pour toute personne en lutte avec ses émotions, originelles ou forgées à grand renfort d’anxiété.

> Vice-versa 2 (Inside Out 2), réalisé par Kelsey Mann, États-Unis – Japon, 2024 (1h36)

Vice-versa 2 (Inside Out 2)

Date de sortie
19 juin 2024
Durée
1h36
Réalisé par
Kelsey Mann
Avec
Amy Poehler, Phyllis Smith, Lewis Black, Tony Hale, Liza Lapira, Maya Hawke, Ayo Edebiri, Adèle Exarchopoulos, Paul Walter Hauser, Kensington Tallman, Diane Lane, Kyle MacLachlan
Pays
États-Unis - Japon