« Vous n’avez encore rien vu »: Resnais n’a peur de rien

« Vous n’avez encore rien vu »: Resnais n’a peur de rien

« Vous n’avez encore rien vu »: Resnais n’a peur de rien

« Vous n’avez encore rien vu »: Resnais n’a peur de rien

Au cinéma le

Le dernier film d'Alain Resnais est reparti bredouille du dernier festival de Cannes. Il aurait pourtant mérité la Palme du concept casse-gueule.

A sa mort, un metteur en scène convoque dans sa demeure les comédiens qu’il a dirigé sur scène dans Eurydice de Anouilh. Le majordome leur projette alors une captation de ladite pièce, interprétée par de jeunes acteurs. Instantanément, les hôtes se remémorent les répliques et se mettent à rejouer les scènes.

Les comédiens reprennent leur rôle | Photo DR

Théâtral, Vous n’avez encore rien vu l’est à plus d’un titre. En premier lieu parce qu’il est construit autour d’Eurydice, la pièce de Jean Anouilh. Ensuite, parce qu’à l’écran, Resnais s’amuse avec la théâtralité des décors et de la mise en scène. Entre les murs en carton pâte, chaque acteur joue son propre rôle et reste dans le champ lorsqu’un de ses confrères se glisse dans la peau d’un personnage, créant ainsi un effet de distanciation. Il faut remonter au Dogville de Lars von Trier (2003) pour retrouver un parti pris de mise en scène reposant sur une théâtralité aussi assumée.

Vous n’avez encore rien vu est cependant loin d’être une captation filmée : Resnais recourt fréquemment à la grammaire filmique (les split-screens…) et a tourné plusieurs scènes sur fond vert…. Le film n’a pas grand chose à voir non plus avec une simple adaptation théâtrale sur grand écran. Si la pièce d’Anouilh est rejouée pour les spectateurs, celle-ci n’est, pour le cinéaste – friand d’expérimentations autour de la narration -, qu’un matériau se prêtant à diverses manipulations ludiques. Certaines scènes sont démultipliées, plusieurs répliques sont répétées, des effets de miroir voient un dialogue s’installer entre les protagonistes du film projeté à l’intérieur du film et les acteurs/spectateurs qui se remettent à jouer la comédie…

Pierre Arditi et Sabine Azéma | Photo DR

Vous n’avez encore rien vu se lit également en creux comme une oeuvre sur le rapport des comédiens à leur métier et au théâtre. L’Euridyce d’Anouilh est une comédienne partie en tournée avec sa troupe… A l’écran, on voit donc des acteurs censés jouer leurs propres rôles avant de se mettre à interpréter des personnages de comédiens. La mise en abîme peut donner le vertige.

Si le dispositif s’avère intriguant, amusant et percutant au départ, le concept finit par lasser et il nous tarde de parvenir au bout du quatrième acte. Les moins patients auront décroché bien plus vite. Le film n’en finit pas de finir en accumulant les (fausses) conclusions expédiées. On pourra se réjouir tout de même de voir que Resnais, qui n’a plus rien à prouver, continue, du haut de ses 90 ans, à prendre des risques et à témoigner d’une foi intacte dans le cinéma.

> Vous n’avez encore rien vu d’Alain Resnais, France, 2011 (1h55) 

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