Star de films pour adultes, Maxine Minx (Mia Goth) débarque à Los Angeles pour réaliser son rêve d’actrice. En s’imposant au casting de The Puritan 2, suite attendue d’un film d’horreur ayant fait sensation, la jeune femme est persuadée que son heure est venue. Rien ne pourra désormais l’empêcher d’accéder à une célébrité si ardemment désirée.
Alors que Maxine semble sur la voie du succès, l’ambiance est lourde dans les rues de la machine à rêves hollywoodienne. Les médias alertent sur les crimes d’un tueur en série insaisissable qui attaque sauvagement les aspirantes jeunes actrices. Un mauvais présage que Maxine décide d’ignorer. Après tout, elle sait se défendre. Pourtant des indices sanglants sur son parcours menacent d’exposer au grand jour son passé trouble.
Retrouvailles prometteuses
Dans cet ultime opus de la saga, Ti West met une nouvelle fois en scène Maxine, héroïne combattante qui a révélé Mia Goth. Gros plans sur les ravissantes taches de rousseur disséminées inégalement autour de son nez retroussé, MaXXXine met plus que jamais en valeur le personnage et l’impose à l’écran comme la star qu’elle rêve de devenir.
Mais cette mise en lumière qui laisse présager son éclosion en star hollywoodienne est à double tranchant. Derrière le glamour et l’espoir, le contraste avec la dureté d’un milieu aux promesses fragiles est cruel. Pire encore, l’ombre d’un passé tenace se fait menaçante. Les retrouvailles avec Maxine s’annoncent mouvementées, dans la continuité d’un parcours brutal et chaotique.
Un genre de conclusion
MaXXXine vient conclure une trilogie remarquée pour son exploration maline et divertissante du cinéma de genre(s). X (2022) joue ainsi habilement avec les codes du film d’horreur avec une production fauchée d’un film prono qui tourne – très – mal. L’occasion de découvrir que la couleur sang sied parfaitement au teint pâle de Mia Goth.
Avec du temps devant lui après le tournage de X, Ti West improvise un prequel. Sorti la même année, Pearl (2022) dévoile les origines familiales pour le moins particulières de Pearl Douglas, bientôt renommée Maxine Minx. Ce second opus sanglant jouant la carte du mélodrame. Il remonte dans le temps et impose – ne serait-ce que par son plan final hypnotique – le magnétisme captivant de Mia Goth.
Conclusion attendue de la trilogie, MaXXXine est l’occasion d’un adieu – temporaire ? – à Maxine. Ti West ne s’interdit pas en effet de la retrouver plus tard dans sa carrière. En attendant, la jeune actrice de film pour adultes explore, bien malgré elle, un nouveau genre dans le Hollywood de 1985. Après l’horreur et le drame, MaXXXine s’amuse avec les codes du slasher avec une touche de film noir et une bonne dose de gore assumée. Un subtil mélange des genres qui baigne dans une atmosphère résolument eighties.
So 80s
A l’instar de Quentin Tarantino, Ti West construit des films nourris de références cinéphiliques. Le réalisateur plonge son héroïne dans des films hommages aux genres qu’il affectionne sans tomber dans la parodie. Horreur, thriller et maintenant slasher… pour ce dernier opus sanglant, Ti West démontre une nouvelle fois son aisance pour manipuler les genres.
Exploration des rêves de gloire dans le Hollywood du milieu des années 80, MaXXXine est résolument ancré dans cette décennie avec un style qui épouse les marqueurs de l’époque. Le slasher se déroule sur fond de musique rock tonitruante, de Judas Priest à ZZ Top, et de synth pop dignement représentée par Frankie Goes To Hollywood et New Order, à la jonction d’un basculement musical.
Le parti pris de réalisation est au diapason de cette bande son : du générique rétro aux néons omniprésents qui éclairent d’une lueur froide la quête de célébrité de Maxine. Volontairement soutenu et parfois rythmé tel un clip musical, le montage renforce cette impression d’un film tourné à l’époque qu’il décrit. L’image en split screen évoquant l’œuvre de Brian de Palma entre autres influences marquent cette volonté de nous immerger au cœur des années 80. Un défi stylistique relevé ici haut la main.
Casting XXXL
Porté par la fausse candeur de Mia Goth incarnant une Maxine plus déterminée que jamais à vivre son rêve, MaXXXine bénéficie d’un casting de poids. Personnage détonnant dans un Hollywood des années 80 très patriarcal, Elizabeth Debicki, la Princesse Diana des dernières saisons de The Crown (2016-2023), incarne la réalisatrice qui décèle l’étincelle et donne sa chance à Maxine.
Ti West embarque également dans son slasher les chanteurs Moses Sumney et Hasley ainsi que Giancarlo Esposito, inoubliable Gus Fring dans la série Breaking Bad (2008-2013) qui campe une nouvelle fois un rôle de dur à cuire impitoyable. Détective privé à la moralité douteuse, Kevin Bacon complète la galerie de personnages. Il ajoute un aspect film noir décalé au film en symbolisant le menace mystérieuse et diffuse d’un passé violent sur le point de rattraper Maxine.
Sweet dreams
Avec son tueur en série caché dans la pénombre, MaXXXine se fait le miroir d’un rêve américain aux reflets monstrueux. Alors que des amies proches périssent sous les coups du mystérieux assassin, Maxine se considère hors de portée de la menace. Comme le suggèrent de furtifs flash-back – certainement mystérieux pour le spectateur n’ayant pas vu les deux premiers opus – Maxine n’est pas une victime, encore moins une proie.
Tournée vers son rêve de gloire, la jeune femme exclu toute possibilité d’un échec. Pourtant l’encombrant détective véreux qui la poursuit est le signe d’un passé auquel on ne peut échapper. Ainsi file à toute allure ce slasher sanglant où le but est d’échapper à sa condition. Mais une détermination sans faille est-elle toujours suffisante ? Le casting de Maxine pour The Puritan 2 au début du film semble apporter un début de réponse.
À la fin de l’entretien pour le film d’horreur, la starlette du porno est invitée à montrer sa poitrine comme dernier argument pour convaincre. Maxine s’exécute de bonne grâce mais ses seins sont pudiquement cachés au spectateur malicieusement renvoyé à son propre voyeurisme. Derrière cette demande exaucée, la détermination sans faille de la jeune actrice mais aussi le poids d’un passé dont on peut s’extraire. Telles deux forces antagonistes qui s’affrontent dans ce Los Angeles impitoyable.
Entre paillettes et hémoglobine, MaXXXine conclut les rêves de gloire de sa tumultueuse héroïne en jouant avec brio la carte de l’immersion totale dans les années 80 dont il épouse tous les codes. Derrière le glamour de la célébrité, ce slasher ludique braque le projecteur sur l’envers d’un décor qui se prête parfaitement aux désillusions mortelles.
> MaXXXine, réalisé par Ti West, États-Unis, 2024 (1h44)