« Les sorcières de l’Orient », smash, pop, win

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« Les sorcières de l’Orient », smash, pop, win

Au cinéma le 28 juillet 2021

Aujourd'hui septuagénaires, les joueuses de volley-ball japonaises surnommées les "sorcières de l'Orient" reviennent sur leur parcours mythique. Réalisé par un cinéaste inventif qui documente le sport comme personne, Les sorcières de l'Orient raconte à travers l'exploit sportif d'une équipe la renaissance d'une nation tout entière. Immortalisée dans la pop culture japonaise, leur leçon de pugnacité a déferlé sur le monde entier.

Dans les années 1960, le Japon est en pleine reconstruction. Signe du grand retour du pays sur la scène internationale, Tokyo organise les Jeux olympiques de 1964. Composée d’un groupe de jeunes ouvrières du textile, l’équipe de volley-ball féminine s’entraîne sans relâche après le travail.

Surnommées les « sorcières de l’Orient », ces joueuses se sont hissées au sommet du volley mondial au prix d’un entraînement intensif. Elles deviennent le symbole du miracle japonais et leur histoire marquera la pop culture pour des générations.

Avec ce nouveau documentaire sportif, Julien Faraut revient sur le destin hors du commun de ces sportives dont l’incroyable parcours est intimement lié au renouveau japonais. Le cinéaste leur donne la parole et remet en scène leurs exploits pour explorer la légende entourant cette équipe mythique.

Les sorcières de l'Orient © UFO production

Dépôt d’un bilan

Le nouveau projet de Julien Faraut débute dans les locaux de l’iconothèque de l’INSEP dont le réalisateur est responsable. Lorsqu’un entraîneur de volley-ball dépose des films d’entraînement de l’équipe féminine de volley-ball japonaise dans les années 60, le cinéaste est frappé par l’intensité de ces archives.

Bien qu’il découvre ces images pour la première fois, elles lui semblent étrangement familières. Les corps des joueuses mis à rude épreuve lors de l’entraînement lui rappellent des séquences du dessin animé japonais Jeanne et Serge (1984-1985) diffusé en France à la fin des années 80.

Et pour cause, l’équipe composée d’ouvrières a fortement marqué les esprits au Japon au point de servir de modèle pour des animés. Après le remarquable L’empire de la perfection (2018) consacré à John McEnroe – lire notre critique – Julien Faraut remet sur le devant de la scène ces incroyables sportives dont les exploits ont inspiré des générations.

Les sorcières de l'Orient © UFO production

Chevilles ouvrières

Dans les années 60, le volley-ball est un sport indissociable de la confection textile au Japon. L’industrie textile a en effet développé la pratique de ce sport chez ses ouvrier.e.s et employé.e.s, majoritairement des femmes. Tenue par un rythme très exigeant, l’équipe féminine nationale vivait, travaillait et s’entraînait dans la même usine textile située à Kaizuka au sud d’Osaka.

À l’origine, les joueuses ont été qualifiées de « Typhon de l’Orient » mais un journaliste soviétique décide de les renommer les « sorcières de l’Orient » après une énième victoire. La sorcière étant mal vue au Japon, les joueuses ont dans un premier temps rejeté ce nouveau nom. Le terme a finalement fini par être accepté par les sportives qui se sont approprié les super-pouvoirs qui vont de pair avec le personnage de la sorcière.

Les sorcières de l'Orient © UFO production

Le triomphe du dévouement

Julien Faraut est allé à la rencontre des survivantes de cette équipe mythique dont le palmarès affiche le chiffre impressionnant de 258 victoires. Affublées à l’époque de surnoms comme la rêveuse, la tuile de mah-jong, la bouilloire ou encore le poisson-lune, les joueuses aujourd’hui âgées de 73 à 83 ans se livrent devant sa caméra sur leur parcours exceptionnel.

De leurs confidences, on retient une étonnante humilité. Dans les années 60, seule comptait la médaille, durement gagnée. Épargnées par la célébrité et la course aux sponsors, ces sportives de haut niveau ont accompli à l’époque leur mission, ni plus ni moins. Un dévouement total qui passait par un entraînement très exigeant.

Les sorcières de l'Orient © UFO production

Daddy pas cool ?

Lorsque Nichibo, l’un des grands groupes de textile japonais, met en place son équipe de volley-ball, il sollicite Daimatsu Hirobumi pour entraîner les ouvrières. L’ancien joueur de volley met alors en place une préparation à la dure.

Après le travail, les joueuses doivent s’entraîner trois fois plus que leurs homologues soviétiques pour rattraper leur retard. En dehors des frontières japonaises, les images de cette préparation intense étonnent voire choquent. Au point que l’entraîneur intraitable est surnommé « demon coach ».

Pourtant, les joueuses reconnaissantes défendent aujourd’hui encore leur entraîneur devant la caméra de Julien Faraut. Certaines allant même jusqu’à le considérer comme un père de substitution. Dans le documentaire, le cinéaste adoucit l’image de tortionnaire du coach, selon lui injuste. En avance sur son temps, la faute de Daimatsu Hirobumi aurait été d’entraîner son équipe « comme des hommes ». Du tyran au coach féministe il n’y aurait qu’un pas, question de point de vue.

Les sorcières de l'Orient © UFO production

L’équipe de la reconstruction

Le parcours historique de ces championnes est indissociable de l’histoire d’un pays en reconstruction. En revenant sur les exploits de ces joueuses invincibles, Les sorcières de l’Orient dresse en filigrane le portrait d’une incroyable renaissance nationale.

Parfois l’histoire se répète. En 1940, le Japon est privé des JO qu’il devait organiser. Ceux de 1964 sont l’occasion de montrer le retour du Japon sur la scène internationale d’après guerre. À l’instar de ceux de 2020 qui ont lieu actuellement avec un an de retard à Tokyo sous le signe d’une double résilience face au drame de Fukushima et à la crise mondiale du Covid.

Les sorcières de l'Orient © UFO production

Pour le Japon, les JO de 1964 sont l’occasion de montrer au monde son incroyable modernisation en un temps record. Pour les sportifs japonais, et en particulier pour les flamboyantes volleyeuses qui venaient de gagner les championnats du monde, la pression est énorme.

Les sorcières symbolisent cet effort collectif national de reconstruction. Lors de ces Jeux où le volley-ball est le premier sport collectif féminin à devenir olympique, elles ne peuvent pas perdre.

La finale qui oppose les attachantes sorcières aux redoutables joueuses soviétiques lors des JO de 1964 est le climax de ce documentaire. Ce match permet à Julien Faraut de démontrer une nouvelle fois son habileté à faire revivre un exploit sportif sous une forme passionnante.

Les sorcières de l'Orient © UFO production

Héroïnes pop

Dans un montage saisissant, le cinéaste alterne images d’archives du match et extraits de dessins animés s’inspirant des exploits des sportives. En intercalant ces différentes sources dont l’animé Attack Number One (1969), l’un des premiers à s’inspirer des célèbres joueuses, Julien Faraut rend hommage à l’héritage laissé par l’équipe dans la culture populaire.

Au-delà des terrains, les joueuses entraînées par Daimatsu Hirobumi ont posé les bases de nombreuses fictions sportives avec des passages obligés tels que la glorification de l’esprit sportif, de la rigueur sans oublier la fameuse botte secrète des joueuses d’exception.

Avec un sens de la narration renouvelant le genre du documentaire sportif, Les sorcières de l’Orient revient sur un parcours étonnant fait de sacrifices et de dévouement faisant écho à la renaissance d’un pays tout entier. Une célébration vibrante de l’exploit sportif de ses héroïnes de haute volée et de leur marque éternelle sur la culture populaire.

> Les sorcières de l’Orient, réalisé par Julien Faraut, France, 2021 (1h44)

Les sorcières de l'Orient

Date de sortie
28 juillet 2021
Durée
1h44
Réalisé par
Julien Faraut
Avec
Hirofumi Daimatsu, Yuko Fujimoto, Yuriko Handa, Yoshiko Matsumura
Pays
France