Ma première expérience du supermarché américain a eu lieu un matin. J’allais au travail pour la première fois. En recherche semi-active d’un petit déjeuner – fruits et céréales – à une heure où mes neurones ne fonctionnent pas encore à plein régime. J’avoue y avoir passé presque une heure tant la fascination était grande. Je me sentais perdue par tant de produits et un mode d’organisation dont je n’ai toujours pas percé le secret, même après plus d’un an passé à New York.
Pour commencer, l’entrée dudit supermarché n’était pas placée à une extrémité du magasin. Position que j’ai toujours pensée comme judicieuse pour que l’on soit sûr de bien passer par tous les rayons et finir chez les yaourts. En France, le rayon yaourts et fromages est presque tout le temps à l’autre bout du magasin ! A New York, il est fréquent d’entrer par le milieu du magasin, ce qui me laisse toujours perplexe puisque je ne sais jamais dans quelle direction aller. Surtout lorsque l’on ne cherche que du lait par exemple, c’est assez frustrant si on se trompe de côté !
Pour ce qui est des rayons eux-mêmes, vue la taille et les ressources des Etats-Unis, le rayon fruits et légumes est souvent impressionnant et regorge de produits frais, les mêmes tout au long de l’année. En ce début de printemps, seules les citrouilles ont disparu mais c’est bien tout, puisque des Etats comme la Floride et la Californie ne connaissent pas vraiment l’hiver et peuvent produire des pamplemousses et autres poivrons et tomates toute l’année. Point de saison donc dans cette partie du magasin. Détail aussi qui m’amuse à chaque fois : tous les fruits et légumes sont étiquetés sans exception.
L’offre des produits et repas tout prêts au rayon frais peut aussi laisser pantois par la variété des produits. A tel point qu’elle correspond à tous les modes alimentaires possibles et imaginables – entre lacto-végétarien, kosher, vegan, etc. Entre religions et convictions environnementales, c’est à se demander si chaque New Yorkais n’a pas son propre régime alimentaire tant l’offre est large !
En termes de produits, autre observation intéressante : le rayon chips et soda. Chacun occupe un rayon distinct. Et j’ai pu constater que les Etats-Unis produisaient des variétés de chips pour le moins inattendues : les doritos y ont une place de choix vue la population mexicaine à NYC, et à côté de cela on y trouve aussi des chips de patates bleues (je n’invente rien), mais aussi des pita chips, élaborées à partir du pain pita dont on se sert pour faire les sandwich (je vous les recommande, elles sont merveilleuses). Là aussi, la variété des saveurs vaut le détour : sel, poivre, piment, jalapenos (sorte de cornichons pimentés mexicains qui arrachent bien), barbecue, steak et j’en passe.
Des sacs recyclés… distribués en double à la caisse
De manière plus générale, les produits qualifiés de "secs" comme les conserves et autres soupes et biscuits connaissent une méthode de rangement pour le moins obscure : en effet, en France, on a une tendance à ranger par saveur : les gâteaux salés et les biscuits sucrés sont stockés ensembles. Ici, on les mélange souvent allègrement dans des parties différentes des rayonnages par… marque, semble-t-il. Ainsi Campbell propose toutes ces conserves de la fameuse soupe aux haricots à la tomate sur un demi-rayon ; l’on peut retrouver d’autres soupes deux rayons plus loin, cotoyant des biscuits de régime. Bizarre… Pareil pour le(s) rayon(s) fromage – souvent au nombre de deux : il m’a fallu un moment pour comprendre que l’un était dédié aux fromages ultra-pasteurisés (c’est-à-dire avec très peu de gout ni aucune bactérie) et l’autre aux fromages qualifiés d’"exotiques" pour les fromages importés.
C’est d’ailleurs à ce moment que je me suis rendue compte que les supermarchés français avaient un mode d’organisation infaillible et en général très similaire quelle que soit la chaîne. Une amie m’a fait remarquer récemment que les supermarchés français étaient pour la plupart d’une propreté clinique, avec un fond de musique d’ascenseur et des annonces régulières – ce qui ne m’avait, à vrai dire, jamais vraiment frappée. Mais en comparaison, il est vrai que les supermarchés à l’américaine se préoccupent davantage de la variété de leur offre que de la lisibilité de leurs produits, prix, etc. Ce qui pourrait expliquer ces méthodes de rangement particulières, mais aussi la radio en fond musical et les rares annonces entre employés.
Place, enfin, aux systèmes de passage à la caisse. Certains supermarchés utilisent les méthodes de file devant les caisses, similaires à celles qui existent en France. Mais d’autres plus malins ou plus équitables (ou moins, ça dépend des jours), disposent un nombre impressionnant de caisses en rangées perpendiculaires aux files d’attente, souvent au nombre de trois, voire quatre. Le principe est simple : on se met dans la plus courte des trois ou quatre files et on attend d’arriver en pôle position pour voir apparaître un numéro de caisse dans l’écran au-dessus de nos têtes. Ainsi, pas moyen de commencer une bataille de sac à main sous prétexte que le client devant vous à oublier de peser ses carottes ralentissant toutes les personnes qui vous suivent et poursuivent (que celui qui n’a jamais été tenté de faire ça me jette la première pierre).
Autre phénomène intéressant : les sacs en plastique ou en papier sont toujours monnaie courante et l’on ne vous en donne jamais un seul mais deux à mettre l’un dans l’autre pour éviter qu’ils ne rompent, et ce, même dans les Whole Food – supermarchés suprêmement chers et connu pour faire copain/copain avec l’environnement… Les sacs ont beau être recyclés, je ne suis toujours pas convaincue du bien-fondé de l’action… Je ressors de ce supermarché new yorkais typique des Etats-Unis, la tête pleine de chips et farcie de sodas, mais des fruits et des céréales dans les bras.