Chacun y met son grain de SEL !

Chacun y met son grain de SEL !

Chacun y met son grain de SEL !

Chacun y met son grain de SEL !

12 novembre 2010

Payer sans dépenser un euro, c'est possible. Au Système d’échange local de Paris (SEL), vous pouvez profiter des objets, services ou compétences de votre voisin sans ouvrir votre porte-monnaie. Une manière de troquer originale, militante et solidaire.

Monique Renambot, piaffeuse depuis trois ans au SEL. | Photo Dorothée Duchemin

L’agitation est inhabituelle en ce samedi matin, dans le local d’une petite rue calme du XIe arrondissement, à Paris. A l’heure où certains sont encore au marché, d’autres préfèrent une activité bien moins mercantile. Ce jour-là, se tient la réunion mensuelle du SEL de Paris (Système d’échange local), une association qui permet aux adhérents d’échanger des objets dont ils n’ont plus l’utilité. Proposer des biens matériels, mais aussi des services et des savoir-faire. Tout se partage, se cède, se négocie. En toute convivialité, mais sans argent en contrepartie. Le terme « euro » n’a pas sa place dans l’assemblée. La monnaie locale, c’est le piaf, en référence au moineau des villes.

C’est donc une sorte de troc, mais pas tout à fait, puisque l’échange n’est pas obligatoirement réciproque. Le compte de la personne qui « vend » son article est crédité du nombre de piafs correspondant. Elle peut ensuite les utiliser, auprès d’une autre personne pour « piaffer » un réveil, un cours de solfège ou même des compétences en couture ou en bricolage. La règle qui a été établie pour fixer les prix est simple : une heure de travail équivaut à 60 piafs. A chacun ensuite de s’adapter et de déterminer librement la valeur de son service.


Monique Renambot, « piaffeuse » depuis trois ans, propose aujourd’hui des chaussures de sport, une salière et une poivrière, un DVD et un livre de cuisine. Du vernis, aussi. Autant d’objets qu’elle donnait auparavant à Emmaüs. Pour cette habituée du SEL, cette manière d’échanger offre de nombreuses possibilités. Notamment le partage de savoir-faire.

Chacun s’agite devant son stand -en fait, une simple table en bois- et vérifie que ses marchandises sont bien visibles. Posées à la va-vite, mais bien en évidence. Les bérets côtoient les magazines, les sacs à main, les bijoux et les gâteaux faits maison. Les discussions s’engagent. Les piaffeurs se promènent dans les allées improvisées de ce marché d’intérieur où l’argent n’est pas roi.
Au-delà du simple échange de biens, l’association a une démarche militante: lutter contre le gaspillage et éviter la surconsommation. Préférer la coopération à la compétition. Pour Claudine Maigre, administratrice de l’association et adhérente depuis 1993, ce système d’échange communautaire et altruiste permet de rompre avec ses habitudes de consommation.

Le SEL de Paris -qui compte 500 membres- a réussi à créer, depuis 1996, un véritable lien social. Une relation de quartier grâce aux rencontres et aux échanges. Et plus généralement, une solidarité entre des piaffeurs qui n’ont pas le même profil, ni le même niveau de vie. Des personnes qui n’avaient donc pas forcément vocation à se croiser dans la rue et encore moins à se rendre service. Et selon Claudine Maigre, la crise économique a entrainé une augmentation significative du nombre de membres. Désormais au SEL, les produits de première nécessité se piaffent également.

Les biens ou services rendus sont parfois beaucoup plus inattendus que des tabourets pliants en bois ou des cours d’informatique : récemment, une voiture a été cédée pour une somme avoisinant les 12 000 piafs. Monique, elle, se contentera d’un ustensile plus petit pour satisfaire son plaisir culinaire. Elle a vendu ses trois chemises et repart avec un siphon à chantilly sous le bras.