A quoi rêvent les jeunes filles ?

A quoi rêvent les jeunes filles ?

A quoi rêvent les jeunes filles ?

A quoi rêvent les jeunes filles ?

Au cinéma le

A quoi rêvent les jeunes filles ? s'interrogeait Alfred de Musset. « Qu'elle va s'offrir en douce un manteau dans le velours d'une aile d'oiseau », répondait pour sa part Alizée, il y a une dizaine d'années. Mouaif, ce n'est pas vraiment ce que nous disent les sorties de la semaine.

Annie, 14 ans, rêve de Charlie. Rivée à son smartphone, collée à son ordinateur, elle passe son temps à chatter avec ce « bogoss » de 16 ans qui vit à l’autre bout des Etats-Unis. Leurs échanges sont enflammés. Elle est amoureuse. Pour la première fois. Puis ils décident de se rencontrer et la bluette vire à la mauvaise rencontre, Charlie n’ayant ni 16 ans, ni 20 ans. Ni même 25 ans. Trust[fn]Trust, Etats-Unis, 2010, réalisé par David Schwimmer (1h46).[/fn], le deuxième film de David Schwimmer – oui, le Ross de Friends – pâtit de sa mise en scène des plus impersonnelles, donnant l’impression de visionner un docu-fiction sur les dangers de l’Internet, les pervers de la Toile, les pédophiles au profil insoupçonnable.

Il ne se montre pas plus convaincant en se risquant timidement du côté du vigilante movie[fn]Le vigilante movie (traduit maladroitement en français par "film d’auto-défense") est un sous-genre du cinéma d’action ou policier. Il met généralement en scène des citoyens qui ne croient pas en l’efficacité des autorités et se font justice eux-mêmes, ou pensent agir pour le bien de la société, en utilisant des méthodes expéditives.[/fn] avec ce père (Clive Owen) prêt à traquer les délinquants sexuels du voisinage. En revanche, en faisant d’Annie une victime qui s’ignore, le film gagne en intérêt. Cette ado clame son amour pour celui qui l’a agressée. Cette confusion et ces paradoxes donnent de l’épaisseur à Trust. Annie ouvre peu à peu les yeux sur ce qu’il s’est passé et, dans le sillage de cette prise de conscience, c’est toute la vulnérabilité d’un âge charnière, auquel on n’est ni tout à fait encore un enfant, ni déjà un jeune adulte, qui fait jour. Un âge fragile, où les rêves peuvent tourner au cauchemar.

Dans son patelin norvégien, Alma, 15 ans, rêve aussi. Ou plutôt, fantasme. A longueur de journées. Turlupinée par le dessous de la ceinture, elle se fait des films, multiplie les appels au téléphone rose à en exploser la facture, s’imagine coucher avec presque tout ce qui bouge. A l’issue d’une soirée, l’adolescent étant cruel, on l’affublera même du surnom de « Alma la bite ». Pas facile à porter, effectivement. Pitché ainsi et fort de son titre exclamatif on pourrait penser que Turn me on ![fn]Turn me on !, Norvège, 2011, réalisé par Jannicke Systad Jacobsen (1h16).[/fn] déboule sur les écrans de la trivialité plein sa remorque. Alors que non, pas du tout. Oui, le langage est parfois crû et l’anatomie masculine y est (furtivement) exposée, mais le film est plus tendre qu’il n’y paraît.

Loin d’être gnangnan, il met en scène une ado fleur bleue – en témoignent ses pensées en forme de roman photo – sans nier sa grande curiosité à l’égard de la sexualité. Il y a bien quelques problèmes de rythme, et l’on pourrait souhaiter que le film aille un peu plus loin dans l’humour corrosif, mais le fait que, pour une fois dans un teen movie, ce soit une fille qui joue les obsédées par la chose, a quelque chose de rafraîchissant.

Ambiance tout aussi scandinave, mais atmosphère bien plus glaciale : c’est le programme de Millenium – Les hommes qui n’aimaient pas les femmes[fn]Millenium – Les hommes qui n’aimaient pas les femmes, Etats-Unis, 2011, réalisé par David Fincher (2h38).[/fn]. David Fincher ne signe pas tout à fait un remake de l’adaptation originale[fn]Millénium, le film, Suède, 2009, réalisé par Niels Arden Oplev (2h32).[/fn] mais offre sa lecture du roman de Stieg Larsson. Certains éléments ont été modifiés, mais l’essentiel du bouquin est là. Ceux qui ont aimé le livre retrouveront sans doute avec plaisir le climat mortifère et malsain qui transpirait au long des pages.

Que Fincher porte Les hommes… à l’écran paraît aujourd’hui une évidence, tant le best-seller est proche des marottes du réalisateur : tueurs en série, obsession de la traque, omniprésence du numérique, mal qui vicie le quotidien… Résultat : plus de deux heures trente haletantes. Et un coup de foudre pour Rooney Mara, parfaite Lisbeth Salander. Un personnage devenu figure de la culture pop contemporaine. Une jeune fille qui rêve, comme le montrera le deuxième volet, d’un bidon d’essence et d’allumettes.

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