« Les météorites », collision d’espérances

« Les météorites », collision d’espérances

« Les météorites », collision d’espérances

« Les météorites », collision d’espérances

Au cinéma le

Ado rêveuse, Nina s'ennuie dans le parc d'attractions où elle doit travailler tout l'été. Lorsqu'elle aperçoit une météorite s'écraser dans la montagne et rencontre Morad peu de temps après, elle y voit un signe du destin. Illuminé par la fraîcheur de sa jeune actrice novice, Les météorites offre une peinture solaire d'une fin d'adolescence tiraillée entre la poésie naïve de l'imaginaire et la terne réalité du monde adulte.

Nina (Zéa Duprez), 16 ans, rêve d’ailleurs. En attendant de nouvelles aventures, elle passe l’été dans le sud de la France entre son village d’enfance et le parc d’attractions où elle travaille. Par l’intermédiaire de son amie Djamila (Oumaima Lyamouri), l’adolescente rencontre Morad (Billal Agab) dont elle tombe immédiatement amoureuse. Pour Nina, ce coup de foudre n’est pas dû au hasard. Juste avant de rencontrer le jeune homme, l’adolescente a assisté à un spectacle rare : une météorite a traversé le ciel en plein jour pour s’écraser dans la montagne. Nina en est persuadée, ce phénomène astral inédit est le présage d’une nouvelle vie qui l’attend.

Les météorites © Les Films du Clan

Innocence mystique

Pour son premier long métrage, le réalisateur Romain Laguna s’attaque à un sujet maintes fois évoqué au cinéma : la bascule — souvent compliquée — de la fin de l’adolescence à l’âge adulte : un rite de passage généralement associé à l’obtention d’une certaine sagesse qui serait l’apanage des adultes. Sur le papier, le scénario est plutôt banal : une jeune ado saoulée par son job d’été s’ennuie dans son village devenu trop petit et s’amourache d’un jeune homme. Mais Les météorites ajoute au tableau une dose de contemplation qui insuffle au récit un parfum d’aventure à peu de frais. La chute de météorite va venir bouleverser le quotidien de Nina qui en avait bien besoin. Mue par la fougue adolescente, l’ado se persuade que tout était écrit, la météorite annonçant sa rencontre avec Morad, qui est, sans aucun doute, l’homme de sa vie.

Tout cela est évidemment presque trop beau pour être vrai et le cinéaste joue sur cette perception très personnelle des événements par la jeune femme exaltée. Une touche de fantastique — au sens de l’incroyable — vient ainsi s’ajouter au mysticisme de la jeune héroïne. Nina est la seule à avoir vu la météorite s’écraser. Cette envie de croire à un changement radical venant bousculer sa vie est-elle réellement la conséquence du phénomène extraordinaire qu’elle a vécu ou en est-elle la cause ? La réalité et le fantasme coexistent tout au long du parcours de Nina, incarnée par une novice qui porte brillamment le film sur ses épaules. Découverte lors d’un casting sauvage deux mois avant le début du tournage, Zéa Duprez assistait à un concert de rap lorsque le cinéaste l’a repérée. Lycéenne en terminale L suivant des cours de cirque, la jeune amatrice au regard souligné du côté droit par une jolie marque rougeâtre est parfaite dans ce premier rôle — dans tous les sens du terme — qui bénéficie de son côté solaire. D’une présence magnétique à l’écran, son regard perçant semble souvent ailleurs : elle incarne parfaitement cette dualité entre réel et imaginaire qui flotte tout au long du film.

Les météorites © Les Films du Clan

La fin d’un monde

Fantasmée ou réelle, cette météorite Nina choisit d’en faire le signe d’un avenir plus excitant, à commencer par l’ivresse des sentiments et les plaisirs de la chair dans les bras de Morad. Pourtant, la masse extraterrestre peut également être le signe d’une destruction. Cette menace potentielle — qui semble ne jamais inquiéter Nina — est en suspens dans l’air de cet été bien particulier pour l’adolescente. Le fait qu’elle travaille dans un parc d’attractions consacré aux dinosaures n’est évidemment pas un hasard. Les « terribles lézards » sont bien placés pour savoir qu’une météorite n’est pas toujours de bonne augure. D’ailleurs, les choses changent autour de Nina : elle se brouille avec son ami Alex, son frère veut s’engager dans l’armée et elle vit peut-être ses derniers instants dans son village natal protecteur avant de rejoindre la ville… Autant d’éléments qui signent la fin de relations et d’une certaine innocence liée à l’enfance. Mais ce contexte qui plane au dessus de sa tête, Nina ne le voit pas encore ou peut-être décide de l’ignorer, éblouie par cette météorite magique porteuse de nouvelles qui ne peuvent être que bonnes. Cette inconsciente naïve propre à l’adolescence rend son personnage particulièrement attachant. En même en pause la marche du monde — et par conséquent sa fin inéluctable —, Nina semble totalement assumer sa fuite contemplative invoquant la magie des contes de fées. Pourquoi s’abaisser à regarder les choses en face lorsqu’il suffit de lever les yeux au ciel en quête d’un signe augural réconfortant ?

Entre réalisme et fantastique, Les météorites invite le spectateur à concevoir le monde à travers le regard d’une ado au mysticisme attachant. Magnifiquement servi par l’inexpérience rafraîchissante de sa jeune actrice, ce joli premier film libère une naïveté magique qui donne envie de croire aux signes prophétiques, ne serait-ce qu’un instant.

> Les météorites réalisé par Romain Laguna, France, 2018 (1h25)

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