L’abordage en demi-teinte du Parti pirate

L’abordage en demi-teinte du Parti pirate

L’abordage en demi-teinte du Parti pirate

L’abordage en demi-teinte du Parti pirate

19 juin 2012

Le Parti Pirate a pour principal objet de défendre les libertés et droits fondamentaux, principalement dans le domaine du numérique. Si le jeune parti n'a pas connu de raz-de-marée électoral lors des législatives, il a néanmoins gagné en notoriété.

« Nous nous attendions à des résultats faibles, relativise d’entrée Maxime Rouquet, co-président du Parti Pirate français. Nos moyens étaient limités… Il n’y avait, par exemple, pas toujours suffisamment de bulletins de vote. Certains candidats ont même demandé à leurs électeurs de les imprimer chez eux. » Cette "campagne à zéro euro" est l’un des nombreux freins qu’ont pu rencontrer les candidats de ce jeune parti – plus de 700 membres – qui se présentaient le 10 juin dernier au premier tour des élections législatives.

Le bateau symbole du parti pirate | DR

Sur les 101 candidats présentés, seuls 23 ont dépassé le seuil des 1%, contre les 50 exigés pour un financement public. Mais la plupart se réjouissent néanmoins d’avoir souvent obtenu des scores supérieurs à ceux de certains partis ayant pourtant présenté des candidats à la présidentielle, tels que Lutte Ouvrière ou le NPA. « Nos résultats sont plutôt encourageants, car nous étions encore de parfaits inconnus il y a quelques semaines. » Et le co-président du parti de regretter l’attitude des médias, qui en sont souvent restés sur un constat d’échec. « Nous n’avons peut-être pas suffisamment communiqué… Mais nous étions déjà très heureux de présenter une centaine de candidats. Notre principal objectif était de nous faire connaître. Un pari réussi. »

Un lent essor en France

Il n’en reste pas moins que la branche française du Parti Pirate peine à émerger. En Allemagne comme en Suède, où il est né en 2006, la jeune formation politique rencontre depuis quelques années un succès sans conteste. En effet, lors des élections européennes de 2009, le parti suédois a remporté plus de 7%, ce qui lui a permis d’offrir au Parlement Européen ses deux premiers députés "pirates". En Allemagne, il vient de remporter en mai 7,6% des suffrages en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, c’est-à-dire pas moins de vingt députés dans une région représentant près du quart de l’électorat allemand. Des députés locaux avaient par ailleurs déjà été élus dans les régions de la Sarre, de Berlin et du Schleswig-Holstein (4, 15 et 6 sièges). Le Parti Pirate allemand est donc en excellente position pour les élections nationales en 2013, se classant cinquième, au coude-à-coude avec les écologistes.

Logo | DR

C’est en juin 2006, au moment de la loi DADVSI (loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information) que le parti pirate naît en France. Mais six ans plus tard, la réussite n’est toujours pas spectaculaire. « Les petits partis peuvent davantage se démarquer lors d’un scrutin à la proportionnelle », justifie Maxime Rouquet. Au delà du mode de scrutin, l’organisation du parti a également été complexe à mettre en œuvre. « En Allemagne, il est plus facile de lancer une structure de manière à ce qu’elle soit fonctionnelle. Mais en France, pour mettre en place un système comme le notre où les adhérents gardent le contrôle, il a fallu que nous rédigions nous-mêmes les statuts. Ce qui nous a pris du temps. »

Maxime Rouquet, co-fondateur et co-président du Parti Pirate | Photo DR

Sans compter un certain nombre de "règles tacites", que ces jeunes flibustiers de la politique ont eu du mal à appréhender. Les deux prochaines années sans élections seront donc l’occasion pour eux de travailler à la fois sur leur fonctionnement interne, et sur leur programme.

Indépendance et risques de récupération

Parmi les revendications actuelles du Parti Pirate, figurent notamment la légalisation du partage sur Internet hors but lucratif, et la promotion de nouvelles formes de financement de la production artistique et culturelle, impliquant la redéfinition du droit d’auteur. Y est également question de lutter contre le fichage abusif et de défendre la transparence de la vie politique.
« Nous ne sommes pas un parti de gouvernement, rappelle Maxime Rouquet. Notre vocation est simplement de porter des revendications insuffisamment défendues par les partis en place, qui partent des idéologies pour les appliquer aux cas concrets. Nous faisons le contraire. » Comprendre : sans pencher a priori d’un côté, ou de l’autre, de l’échiquier politique. Ce qui n’a pas découragé les tentatives d’approches de la part de nombreux partis. « En fonction de leur positionnement, certains espèrent notre développement pour affaiblir leurs opposants, d’autres nous proposent des alliances. Mais nous restons méfiants. Nous souhaitons garder notre indépendance. »

Le PP aux législatives | DR

La victoire du Parti Socialiste laisse par ailleurs Maxime Rouquet sceptique. « Nous n’étions certes pas satisfaits de la politique de la majorité sortante, mais ce que nous avons déjà tenté avec les socialistes ne nous a pour l’instant pas convaincus. Les discours restent très flous sur Hadopi. Nous craignons les positions électoralistes. »

Prochaine échéance pour le Parti Pirate : les élections européennes de 2014, dont le scrutin, à la proportionnelle, devrait leur être plus favorable.