« Fifty Shades of Grey » horripile Maîtresse Cindy

« Fifty Shades of Grey » horripile Maîtresse Cindy

« Fifty Shades of Grey » horripile Maîtresse Cindy

« Fifty Shades of Grey » horripile Maîtresse Cindy

20 février 2015

Succès planétaire en libriairie "Fifty shades of Grey" d'EL James est aujourd'hui un film qui domine les box-office du monde entier. L'histoire de cette jeune vierge pas si effarouchée qui tombe dans les bras d'un dominateur désireux d'en faire sa soumise affolle les libidos en mal de légers coups de fouet et tirage de couette. Citazine a voulu connaître le regard que porte maîtresse Cindy, figure parisienne du sadomasochisme, sur ce SM en carton qui fait tant gloser. Pas du bien, vous l'aurez compris.

Nous avions déjà rencontré Maîtresse Cindy dans son donjon, dans le 18è arrondissement, à Paris. Figure emblématique du sadomasochisme, cette artiste performeuse a fait de son donjon un temple SM mais aussi un lieu artistique, SM.art. Dans cette véritable machine à fantasmes, maîtresse Cindy invite ses visiteurs à explorer de multiples jeux et scénarios. Pour elle, « Fifty Shades of Grey » a deux fonctions : aider les journalistes à faire du clic et chatouiller la culotte de celles qui ignorent tout de cette pratique sexuelle.

Photo DR

Quel regard portez-vous sur le phénomène « Fifty  shades of Grey » ? Assiste-t-on à une véritable démocratisation du sadomasochisme ?

La recrudescence d’articles, d’événements et ce battage médiatique autour de ces ouvrages et de ce film qu’est “Fifty Shades of Grey”, d’une certaine façon, m’horripile. Pour recadrer les choses, il ne s’agit en fait que d’un roman à l’eau de rose très mal écrit, littérairement sans intérêt, mal reçu par la critique, et utilisant le sadomasochisme comme prétexte et faire-valoir. Il dessert bien évidemment cet univers, auquel il ne correspond en rien, et rares sont les pratiquants qui s’y retrouvent. Il faut donc cesser de faire l’amalgame entre la fiction issue d’une auteure puisant dans ce filon commercial et la réalité. C’est une manœuvre habituelle et bien rodée, fonctionnant parfaitement auprès de la masse dépourvues de connaissances autour de cet univers mais recherchant son petit frisson érotique. À l’image des stars jouant de plus en plus sur scène ou sur les tapis rouges avec l’imagerie sadomasochiste et fétichiste, tout cela ne sert qu’a faire du buzz pour les médias de tous poils friands de ce genre de sensationnalisme… et cet article en est la preuve. Par définition, les modes se démodant, je ne me sens en aucun cas concernée par cela. Et disserter autour de ce produit grand public au marketing bien rodé n’aurait aucun sens puisqu’il ne correspond aucunement à mes intérêts.

Photo © Barbara Ryckewaert

Loin de l’enjeu du film « pourquoi tu me fais mal si tu m’aimes », quel est l’enjeu d’une relation sadomasochiste ?

La réalité des relations sadomasochistes s’inscrit dans le cadre d’une expérience à vivre entre partenaires consentants, dont les règles sont établies et les limites fixées au préalable en fonction des aptitudes de chaque individus et de leurs désirs de se surpasser, autant pour le dominant que pour le dominé, sans oublier les aspects de sécurité. Pour en revenir brièvement au phénomène de démocratisation, la prudence est de mise car s’essayer au SM sans en connaître les usages comporte des risques comparables à la pratique d’un sport extrême. Il faut donc sans cesse être à l’écoute de l’autre car il s’agit d’un échange interactif. Le déroulement des pratiques et leurs aboutissements ont autant de formes qu’il existe d’individus et de désirs. De fait, cette sexualité est particulièrement favorable à une approche inventive et fantasmagorique afin de stimuler l’imagination grâce à l’infinité de scénarios possibles. Les sensations extrêmes procurées par les pratiques liées à la douleur ou à l’humiliation permettent de catalyser les émotions fortes et les plaisirs charnels en vertiges puissants et en jouissances fusionnelles.

Photo © Maîtresse Cindy

Cette approche fantasmagorique est le pilier de votre donjon, à Paris ?

Dans cette optique, j’ai depuis toujours tenu à maintenir un lieu différent et novateur par la théâtralisation des fantasmes que je met en scène pour mes partenaires de jeux à l’aide de véritables scénographies dont les inspirations sont réfléchies et documentés par rapport à des influences historiques, artistiques, littéraires. Les décors réels et en projection numériques, la sonorisation élaborée, la mise en lumière ainsi que de matériel unique fabriqué à mon intention structurent un univers fantasmagorique dans lequel les participants voyagent et sont stimulés pour réaliser les fantasmes les plus improbables. L’association sm.art, intiative crée en 2012, ouvre les portes de mon univers aux pratiquants BDSM et au monde de l’art lors d’événements. En ces occasions, un public hétérogène s’y croise, échange, s’y exhibe et se livre à un ensemble de pratiques allant de l’initiation aux jeux les plus pervers en passant par les badinages les plus sensuels. Pour conclure, mon expérience et mon vécu au travers de cet univers me feront dire qu’il n’y a pas de schémas type. Une relation vis à vis du sadomasochisme se construit par attrait, par goût et en suivant une quête qui vous amènera à effectuer les rencontres qui structureront progressivement votre parcours vers un épanouissement personnel. Et aucunement par souci de se conformer à une mode.