Scènes de crimes

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Scènes de crimes

Scènes de crimes

Au cinéma le

Cette semaine, si les écrans se mettent à l'heure du crime, les films ne sont pas tous mortels (ou alors d'ennui).

Possessions

L’affaire Flactif avait alimenté les pages "faits divers" des journaux en 2003 et 2004. Elle nourrit aujourd’hui le scénario de Possessions[fn]Possessions, France, 2011, réalisé par Eric Guirado (1h38).[/fn]. Les noms des protagonistes et les lieux ont été changés mais l’intrigue s’avère fidèle aux événements. Maryline et Bruno Caron quittent le Nord pour une nouvelle vie à la montagne. A peine arrivés dans les Alpes, ils apprennent que le chalet dans lequel ils pensaient emménager n’est pas terminé.

Patrick Castang, le propriétaire et promoteur immobilier qui les accueille, leur propose de déballer leurs affaires dans un autre chalet, d’un standing bien supérieur. Mais la belle vie ne durera qu’un temps. « Tu ne convoiteras point », exhorte l’affiche du film, livrant au spectateur l’un des nœuds du drame. Car c’est l’envie et la jalousie, sur fond d’opposition de classes – les prolos contre les nouveaux riches – qui mèneront au bain de sang.

Chaque vexation, humiliation ou parole condescendante dont font l’objet (ou pensent être victimes) les Caron, attise une rancœur contenue. Jusqu’à l’explosion. Telle est la lecture qu’Eric Guirado fait de la mécanique de ce crime qui a marqué les mémoires. Le problème, c’est que le film est lui aussi un peu mécanique, se contentant d’enchaîner les scènes lourdes de sens jusqu’au déchaînement meurtrier, comme un simple lien de cause à effet, plutôt que de tenter de décrire la perte de sang froid et le vertige criminel.

D’où l’impression de voir davantage un docu-fiction, cherchant à rationnaliser au maximum les événements, qu’un thriller possédé par la fièvre. A noter cependant la bonne alchimie du duo Julie Depardieu-Jérémie Renier (que l’on retrouvera la semaine prochaine dans les bottines de Cloclo pour un biopic réussi).

Elena

Dans Elena[fn]Elena, Russie, 2011, réalisé par Andreï Zviaguintsev (1h49).[/fn], la lutte des classes n’a pas lieu : riches et pauvres ne s’opposent pas parce qu’ils ne se croisent pas. La femme qui donne son nom au film fait le lien entre les deux mondes. Remariée à Vladimir, un oligarque, Elena a quitté sa condition modeste mais rend visite régulièrement à la famille de son fils en perpétuelle galère de fric. Le refus de Vladimir de mettre la main au porte-monnaie pour financer les études du petit-fils de son épouse (et lui éviter l’armée) précipitera le drame.

Andreï Zviaguintsiev privilégie les plans larges, semble vouloir garder une certaine distance avec les personnages qui paraissent prisonniers de leur environnement. Il étire la durée de chaque plan, au cadre soigneusement composé, pour mieux faire émerger de cette beauté froide, l’égoïsme et l’individualisme des protagonistes qui ne communiquent que lorsqu’ils attendent quelque chose de l’autre.

Le réalisateur filme les prémisses d’un assassinat de la même manière qu’une anodine préparation de petit-déjeuner. Il n’épargne personne, ne trouve de circonstances atténuantes ni aux riches, ni aux pauvres et esquisse un portrait sans concession d’une Russie où le "chacun pour soi" s’exerce en toute impunité.

À l’aveugle

Comment un non-voyant peut-il signer une série de meurtres ? Le pitch d’A l’aveugle[fn]A l’aveugle, France, 2011, réalisé par Xavier Palud (1h34).[/fn] a de quoi aiguiser la curiosité. Mais si vous envisagez de jeter un œil ou deux à ce film, mieux vaut ne pas placer trop haut la barre de vos attentes. Le début est plutôt prometteur, Jacques Gamblin et Lambert Wilson font du bon boulot, mais le troisième film de Xavier Palud tombe rapidement dans le piège du thriller à la française peinant à se démarquer des influences américaine et coréenne (la Corée du Sud s’étant imposée depuis quelques temps comme la meilleure couveuse de polars).
L’intrigue, elle, s’émousse assez vite et ne parvient pas à retomber sur ses pattes. Rien de criminel là-dedans, ce n’est que du cinéma.

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