Namaste !

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Namaste !

20 septembre 2010

Marc-Olivier, fou de voyages à la plume chatouillante, raconte son périple en Inde. Premier volet d'une expérience vécue cet été. Fascinant et haut en couleur !

Et bien voila, je suis de retour en Inde! L’arrivée à Delhi s’est faite sous une chaleur suffocante… C’est bizarre de se retrouver dans cette bonne vieille rue de Main Bazar un an après, sauf que cette fois des travaux ont été entrepris mais on ne voit pas bien vers quoi cela tend… J’imagine qu’il s’agit de bitumer mais bon…

Après une bonne sieste, direction la gare pour réserver un billet de train à destination des Goa. Pas question de rester dans cet enfer urbain! On a beau avoir déjà connu le fourmillement des gares indiennes, c’est toujours un choc! La foule est partout, tout s’agite au milieu de centaines de personnes allongées à même le sol. Une heure d’attente et enfin le train arrive sur le quai. Je m’assure que c’est le bon, histoire de ne pas me tromper… C’est déjà arrivé l’année dernière et ce n’est pas drôle de se rendre compte au bout de dix heures de trajet que l’on est dans le mauvais sens! On est dimanche matin, il est 9h20 et je dois arriver le lendemain soir à 21h30… Quarante heures pour descendre vers le sud, le trajet promet d’être long!

Les paysages ne sont pas toujours beaux, peu de relief, peu de verdure et très vite c’est le plateau du Dekkan, écrasé de chaleur, très aride et plat. Mais le spectacle est à l’intérieur du train! Les allées et venues continuelles des vendeurs de cafés et de cay, les vendeurs ambulants qui proposent des beignets ou des journaux. On propose même des cerises presque pourries dans du papier journal… sans doute le plus puissant laxatif du train que j’ai pu voir ! Jusque-là, rien de bien extraordinaire mais quelques personnages sortent de l’ordinaire : une jeune femme qui vous brandit sous le nez une boîte qui renferme des figurines et dans laquelle fume de l’encens, vous prend le bras pour que vous lui donniez de l’argent; un homme qui propose de curer les oreilles (incroyable de voir un gars qui sort une aiguille, la tourne autour d’un petit bout de coton et vous propose de curer… bravo!); les enfants déguisés et parfois même maquillés qui font des cabrioles dans l’allée et qui passent leurs corps dans de minuscules cercles de fer… Bref, un vrai cirque Pinder!

Tout cela pourrait être drôle si ce n’était accompagné d’un flot continuel de mendiants, tous plus abîmés les uns que les autres, toute la misère indienne qui se concentre dans les gares et qui s’étale dans les wagons entre chaque gare. Un vieux monsieur qui rampe et qui exhibe sa jambe purulente, une vieille femme dont le travail est de balayer presque à mains nues le sol à quatre pattes, un énorme furoncle dans le dos, et ce pour quelques roupies (1 euro = 58 roupies), les unijambistes… Je vous épargne les détails! Dans tous les cas, on prie qu’ils ne nous touchent pas… C’est vraiment difficile de voir tout cela mais on ne peut pas donner de roupies à tout le monde… Ce qui frappe c’est que dans ce wagon sleeper class, les places sont occupées par des personnes de la classe moyenne qui affichent un mépris assez extraordinaire pour la misère de leurs compatriotes. Certains observent ma réaction et s’en amusent en souriant.

Le voyage continue et mes voisins commencent à me parler. Il leur faut toujours une phase d’observation. Je parle des hommes bien entendu! Pour les femmes, ce n’est pas imaginable! Je bois quelques cafés et beaucoup d’eau pour lutter contre la chaleur. A chaque gare, c’est à nouveau le spectacle d’une gigantesque fourmilière humaine que je ne me lasse pas d’observer… Très souvent aussi, de formidables odeurs de merde vous prennent au nez, presque jusqu’à la gorge… Sans doute les effluves de tous ces étrons qui se dorent la pilule au soleil sur les voies… Et oui, ce sont les toilettes publiques! Sur les voies ferroviaires, il faut avoir le pied marin… Je vous épargne les détails encore une fois mais l’odeur est parfois presque insoutenable. On sait quand on approche d’une gare!

Je dresse un tableau assez négatif, mais c’est une oscillation permanente entre fascination et répulsion. On peut passer de l’une à l’autre en quelques secondes! Discuter avec des soldats qui descendent sur Bombay pour prendre un vol vers le Soudan, échanger avec ses voisins de cabine, observer le paysage le deuxième jour: tropical et verdoyant, des rizières étagées de toute beauté. Extraordinaire!

Je n’ai presque rien mangé durant ces deux jours sinon un peu de riz et quelques chips, pas vraiment faim et pas vraiment envie de prendre le risque de visiter les toilettes du train… Un jeûne pendant lequel je me nourris de Paul Auster que je ne connaissais pas et dont je suis tombé amoureux au bout de dix pages! Encore une fois c’est toute la puissance de la littérature américaine qui agit. Leviathan m’accompagne tout le voyage!

J’arrive enfin à Madgaon, une des gares de l’Etat de Goa. Tout de suite un gars se propose de m’emmener dans un hôtel pas cher avec sa moto. Quand il est 21 heures et que vous ne connaissez pas la ville, vous faites confiance avec un peu d’appréhension mais tout se passe bien. La douche me semble luxueuse, je prends un vrai repas et vais au lit pour repenser à ces deux jours incroyables! Je pars demain midi pour les plages de South Goa me poser un peu, avant d’explorer le nord et ses vestiges coloniaux portugais!