« Money », longue nuit polar

« Money », longue nuit polar

« Money », longue nuit polar

« Money », longue nuit polar

Au cinéma le

Trois jeunes havrais en galère décident de voler une mallette pleine d'argent appartenant à un notable local mais rien ne se passe comme prévu. Ils se retrouvent rapidement pris dans une spirale de violence qui les dépasse complètement. L'auteur de 13 Tzameti signe un polar intense mais trop fébrile pour laisser s'exprimer ses personnages.

Danis (George Babluani) et Eric (Vincent Rottiers), deux amis d’enfance travaillant sur les docks du Havre, vivent des fins de mois difficiles. Un après-midi, Alex (Charlotte Van Bervesseles), la sœur d’Eric, assiste par hasard à la remise d’une valise remplie de billets et décide de suivre son heureux propriétaire. Sous l’impulsion d’Alex qui convainc Eric et Danis que ce pactole pourrait changer leur vie, les trois jeunes décident de cambrioler la maison où se trouve la mallette. En arrivant, ils découvrent sidérés que l’homme qui a récupéré la valise est sur le point de se pendre. Ils interrompent son suicide le temps de récupérer l’argent sans se douter qu’ils viennent de braquer Mercier (Louis-Do de Lencquesaing), un secrétaire d’Etat corrompu, et que cet argent provenait d’une entreprise criminelle. Les faits s’enchaînent alors rapidement et la situation devient incontrôlable. Le simple cambriolage va devenir pour les trois délinquants en herbe une nuit cauchemardesque.

Money © photo Electrick Films - Océan Films

Emmerdes non stop

Avec Money, le réalisateur du marquant 13 Tzameti (2005) et de son inutile remake américain 13 (2010) souhaitait proposer un « polar à l’ancienne ». Un pari plutôt réussi pour ce qui est de la forme de ce film sous tension qui mène les trois jeunes cambrioleurs de mauvaises surprises en désagréables découvertes. Exercice de style assumé, le cinéaste joue sur l’enchaînement imprévisible — parfois à la limite de l’improbable — des événements et des retournement de situations qui dictent le rythme de ce polar fébrile qui ne laisse jamais aux protagonistes le temps de reprendre leur souffle. Dans ce drôle de casting où tout le monde a quelque chose à se reprocher, chaque personnage doit prendre des décisions très rapidement, sans vraiment réfléchir, ce qui explique en partie l’accumulation de situations incongrues. Une scène présente dans le générique de fin avec un Benoît Magimel plutôt flippant en bras droit de Mercier appuie d’ailleurs avec un clin d’œil malicieux sur l’aspect ironique et volontairement décalé de cette nuit qui part en vrille. Le cambriolage raté de Danis, Eric et Alex n’est que le début d’une longue descente aux enfers, dans un panier de crabes où ils n’auraient jamais dû mettre les pieds. Cet argent tant convoité ils vont le traîner comme un boulet apportant son lot de coups bas et de trahison.

Money

Personnages paumés

Cette thématique d’une personne se trouvant au mauvais endroit au mauvais moment et embarquée malgré elle dans une suite d’événements incontrôlables rappelle ce qui arrive au personnage de Sébastien dans 13 Tzameti. Mais, cette fois-ci, ils sont trois à tenter leur chance en s’aventurant dans la maison du politique corrompu et il est plus difficile de s’attacher de façon égale à ces jeunes qui se retrouvent projetés très rapidement en plein chaos. La volonté d’un polar mené à 100 à l’heure, assez réussi sur ce plan, pénalise malheureusement les trois amis qui ont du mal à inspirer de la sympathie, à défaut d’une quelconque empathie. Sur ce point Money souffre de la comparaison avec Good Time (2017), autre polar survolté sorti dans les salles obscures ces derniers jours. Les deux films partagent cette idée d’un délit qui part en vrille avec l’essentiel de l’action principalement concentrée sur une nuit. Mais alors que le film des frères Safdie réussit à développer — malgré sa frénésie — des personnages complexes et attachants, le polar de Géla Babluani se suit sans déplaisir mais peine à donner corps aux trois apprentis cambrioleurs, perdus dans une tempête d’événements qui s’enchaînent plus vite qu’ils n’arrivent à les gérer.

Polar qui enchaîne sans pause les conséquences désastreuses à des choix discutables, Money entraîne le spectateur dans une nuit intense où trois jeunes braqueurs amateurs sont mis à rude épreuve. Un exercice de style distrayant mais qui ne marque pas au-delà de l’aube qui se lève pour effacer les traces de cette folle nuit agitée.

> Money, réalisé par Géla Babluani, France, 2017 (1h30)

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