Hitchcock : un hiver pour Alfred

Hitchcock : un hiver pour Alfred

Hitchcock : un hiver pour Alfred

Hitchcock : un hiver pour Alfred

Au cinéma le

Hitchcock, le maître du suspense est à l'honneur cet hiver. Il fait l'objet d'une rétrospective à l'Institut Lumière à Lyon. Quant à la Cinémathèque française, c'est l'ensemble de son œuvre qui pourra y être vue ou revue. Au-delà d'une scène de la douche, responsable d'une génération de traumatisés, pourquoi Alfred Hitchcock vieillit-il aussi bien ?

« On le connaît par cœur », « Toute sa filmographie est déjà disponible en DVD »… Oui, sauf qu’on n’a jamais fini de découvrir Alfred Hitchcock. La preuve : trente ans après sa mort, le personnage fascine toujours et fait régulièrement l’objet d’expositions et rétrospectives, partout dans le monde. En France, ce sont les cinémathèques de Paris et de Lyon qui proposent de revoir en ce moment l’ensemble de son œuvre en salle. L’occasion de se rappeler que le Maître du suspense n’a pas fini de nous surprendre. Démonstration menée avec Jean-François Rauger, programmateur de la Cinémathèque française.

Des films qui nous regardent vieillir (mais ne prennent pas une ride)

Le propre des films d’Hitchcock, c’est leur incroyable richesse. « D’un visionnage à un autre, on ne cesse jamais de découvrir quelque chose », raconte Jean-François Rauger, programmateur de la Cinémathèque. « C’est pour cela que les grandes oeuvres doivent être constamment revues. Hitchcock a fait des films qui nous regardent vieillir. Dix ans plus tard, on les regarde différemment. »
Lorsqu’on évoque Psychose par exemple, on pense toujours à la révélation finale, à la scène de la douche, sa musique stridente, sa violence et sa valeur psychanalytique. « Mais le film comporte des scènes assez peu commentées : les deux apparitions du personnage du sheriff par exemple (joué par John McIntire, ndlr). Ce sont de très belles scènes, qui, au-delà de faire avancer la narration, montrent la profondeur des personnages, une humanité passée tout d’abord inaperçue, parce qu’on était obnubilé par les scènes plus frappantes et plus violentes. »

Plus qu’un cinéaste, un artiste…

Hitchcock n’est pas seulement un grand cinéaste, c’est aussi un grand artiste. « A travers ses films, il a pensé l’Homme. Marqué par le christianisme, il a proposé des lectures métaphysiques, psychanalytiques et même mythologiques du Monde. » Au-delà de la performance cinématographique, c’est un penseur qui a marqué l’histoire de l’art. L’étiquette du "Maître du suspense" est donc très réductrice.

… et un grand manipulateur

Tout cinéaste manipule, mais Hitchcock était particulièrement doué dans ce domaine. « Comme il tenait à ce que ses films marchent en salle, il faisait tout pour attirer le public le plus large possible. Or, le spectateur aime avoir peur : c’est l’une des raisons qui expliquent l’épouvante et le suspense dans ses films. Pour mieux manipuler le spectateur, il abordait des thématiques dont il savait qu’elles toucheraient une corde sensible : la thématique de la mère, de l’identité sexuelle, du dédoublement, etc. Le cinéma en général a un rapport privilégié à la psychanalyse, puisqu’il montre un monde fantasmé. Cela, Hitchcock l’avait très bien compris. »

Imité, copié… jamais égalé

Hitchcock a bien une héritière, Patricia, mais en matière de cinéma, il n’a jamais eu de descendant direct. « Pourtant, son influence est totale, rappelle Jean-François Rauger. D’abord, parce qu’il a porté les méthodes cinématographiques à leur perfection, et elles se retrouvent partout aujourd’hui. Quasiment tous les films d’épouvante hollywoodiens actuels s’inspirent de lui, et de sa façon d’installer le suspense. Ensuite, on retrouve évidemment son influence dans le cinéma de Truffaut, sans doute l’un de ses plus fervents admirateurs, ainsi que chez Claude Chabrol ou Jean-Claude Brissaut. »
Au-delà de l’influence qu’il a eue sur les générations futures, Hitchcock a aussi été copié, de son temps déjà : c’est le cas de Hantise de Georges Cukor (1944), « une bonne imitation » pour Jean-François Rauger, ou encore dans Pas de lauriers pour les tueurs de Mark Robson (1963): « un peu raté. »

Pour le plaisir

C’est le but clairement avoué de la rétrospective qui a commencé mercredi 5 janvier à la Cinémathèque de Paris (jusqu’au 28 février). « Parce que le visionnage d’un film d’Hitchcock au cinéma n’a rien à voir avec celle d’un DVD, affirme Jean-François Rauger. Je ne dénigre pas le DVD, qui permet de découvrir des raretés. Mais le cinéma reste la meilleure façon de percevoir ses films, et ses influences. L’expressionisme allemand ou encore le cinéma soviétique, pour ne citer qu’elles. Revoir un film d’Hitchcock, c’est la répétition d’un plaisir d’une part, mais aussi une manière d’en apprendre encore davantage. »

 

En savoir plus

Alfred Hitchcock sera également à l’honneur l’Institut Lumière de Lyon du 4 janvier au 3 avril. Ces rétrospectives, à Lyon et à Paris, sont organisées à l’occasion de la sortie française du livre de Patrick McGilligan. Alfred Hitchcock, une vie d’ombre et de lumière (éd. Actes Sud/Institut Lumière). La biographie est monumentale, perçue comme le portrait le plus abouti du maître. Bertrand Tavernier et Thierry Frémont, respectivement président et directeur de l’Institut Lumière, ont voulu accompagner l’événement par un hiver hitchcockien.

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