Au numéro 166 de la rue de Charonne à Paris, se cache un drôle d’endroit. Nichée au fond d’une cour, au rez-de-chaussée d’un ensemble de bâtiment HLM, la société de monsieur et madame Leguel envoie 500 jambons par semaine dans les établissements de la capitale. Le Meurice, le Park Hyatt, le Royal Monceau… ce jambon a ses entrées dans les prestigieuses enseignes de Paris. Et pour cause, il est le dernier jambon de Paris. « Ici, nous sommes dans la dernière salaison de Paris. On fabrique le jambon de Paris, à l’ancienne. » Ici pas de barattage ni de baratin. Ici le jambon de Paris est préparé à l’ancienne et bénéfice du label Saveurs de Paris, Ile de France.
La saumure – une recette faite de sel, d’une décoction de légumes et d’épices, est préparée par les chefs charcutier puis injectée à la seringue directement dans l’artère. « Le saumurage se diffuse dans le muscle par le réseau veineux », explique Yves Leguel. C’est ainsi qu’il obtient un jambon à la chair tendre et gouteuse. « Surtout, il faut laisser le temps au jambon de baigner dans son jus. »
Produit des lendemains de fêtes
Son produit star, c’est le prince de Paris, marqué au fer par une tour Effel. Sa saumure est préparée au sel de Guérande selon une recette tenue secrète. C’est son précieux à lui, sa perle, son trésor, le Nec plus ultra du jambon de Paris. De larges tranches, une chair fondante, un goût délicat, le prince de Paris en impose. Alors que nous nous apprêtons à baffrer sans relâche pour les fêtes de fin d’année, le Prince de Paris est-il si noble qu’il s’invite-t-il même sur les tables des réveillons ? « Non, mais en revanche le jour qui suit, on remarque une petite augmentation des ventes. Les gens ont fait beaucoup d’excès et préfèrent manger plus léger et plus sain, une ou deux tranches de jambon les lendemains. »
Ici, plusieurs cochons ne font pas le jambon. C’est un jambon, un cochon. Venus de la Mayenne, de la Sarthe et de la Bretagne, les jambons sont accueillis rue de Charonne par monsieur et madame Leguel et les 10 salariés de la société Doumbéa-Sojadam. Doumbéa, c’est le nom du village où habite le beau-frère du patron en Nouvelle-Calédonie. Sojadan, le nom que portait la boîte quand le couple l’a rachetée en 2005. Avant ils travaillaient dans la chimie.
Le goût des bonnes choses
Yves Leguel aime la bonne bouffe. « Il le faut pour bosser dans l’alimentaire et faire un produit de qualité qui ait du goût. » Il est un peu militant avec son jambon. Il milite contre la nourriture insipide, inodore et sans saveur qui peuple les rayonnages des grandes surfaces : « Les industriels ont fait perdre le goût aux gens ».
« La qualité c’est l’avenir », assène-t-il comme un slogan. Et ses clients lui donnent raison. A côté des épiceries fines, des bouchers, des charcutiers et des restaurateurs qui se fournissent chez lui, de nouveaux clients s’inscrivent dans son carnet de commandes : les sandwicheries. « C’est un phénomène assez récent. Des sandwicheries, qui veulent faire de la qualité avec du bon pain, du bon beurre et du bon jambon de Paris. » Eux aussi y croient : la qualité c’est l’avenir.