Voilà un an que Marin et son fils Nemo sont de nouveau réunis et vivent avec Dory, sympathique poisson souffrant de troubles de la mémoire immédiate. Alors qu’elle est généralement incapable de se rappeler de ce qu’elle vient de dire, Dory est soudain frappée par un souvenir qui semble être en lien avec son enfance. Cette révélation la pousse à tenter de retrouver ses parents, dont elle a tout oublié. Cette quête pour découvrir son passé va entraîner l’optimiste poisson dans une aventure folle qui va redéfinir sa notion de la famille.
Dans le même bain
Treize ans après la première aventure, Andrew Stanton — réalisateur du génial Wall-E (2008) et de l’accident industriel John Carter (2012) — replonge dans l’océan, avec Angus MacLane à ses côtés, pour donner une nouvelle fois vie aux attachants poissons multicolores qui ont fait le succès du premier opus. Au programme de cette suite, la même équipe se retrouve une nouvelle fois confrontée à un voyage qui va les mener très loin de chez eux.
Cette fois, c’est Dory qui a des fourmis dans les nageoires et part à la recherche d’une famille dont elle n’a quasiment aucun souvenir. On retrouve dans ce nouvel opus un ressort scénaristique familier : sur la piste de ses origines, Dory est capturée par des humains et, tandis qu’elle continue ses recherches de son côté, Marin et Nemo tentent de retrouver leur amie. Évidemment, tout au long du voyage, les rencontres et les situations cocasses, voire dangereuses, vont se succéder à un rythme soutenu.
Capturée — pour son bien — par l’équipe d’un institut maritime qui a pour mission de soigner les poissons avant de les remettre en liberté, Dory retrouve la piste de ses parents. On note au passage que Pixar a décidé de mettre en avant un établissement utile et responsable qui relâche les animaux dans la nature, et non un centre à visée uniquement commerciale et ludique. Aidée par Hank, un poulpe relativement asocial, elle remonte lentement la piste de ses souvenirs incomplets. Cette partie du film est par ailleurs assez confuse, le scénario ne prenant pas toujours en compte le temps qui s’est écoulé depuis la disparition de Dory.
Il est vrai que sans aucun souvenir et par conséquent aucune possibilité de se situer dans le temps, Dory n’a elle même aucune idée du temps passé depuis sa séparation avec ses parents, mais sa méthode pour retrouver ses parents n’est pas toujours logique. Mis à part ce flottement dans le déroulement de l’histoire, Pixar montre une nouvelle fois sa maîtrise pour accrocher le spectateur avec des personnages secondaires marquants — mention spéciale pour les bébés loutres, équivalent maritime des chatons qui ont envahi Internet — et une aventure qui ne souffre d’aucun temps mort. Les souvenirs qui assaillent Dory et reviennent sous forme de flash-backs où on la découvre enfant avec ses parents sont particulièrement réussis et touchants.
Vagues de souvenirs
Au-delà du plaisir de retrouver les poissons fétiches de Pixar, l’intérêt de ce nouveau film est d’explorer une autre facette du personnage de Dory, plus grave et plus complexe. Si l’on revient au titre original du premier film consacré à ces sympathiques poissons — Finding Nemo (2003) —, il s’agissait de « trouver Nemo » qui s’était physiquement perdu. Dans cette nouvelle aventure, ce sont Nemo et son père qui partent à la recherche de Dory, qui est elle-même en quête de parents. Mais la traduction française gomme le double sens du titre original qui suggère que le poisson aux souvenirs quasi inexistants est également à la recherche d’elle-même. Focalisée sur Nemo et Marin lors du premier opus, l’attention est désormais captée par Dory et le film plonge plus en profondeur dans ses états d’âme.
Dans le premier film, les pertes de mémoire à répétition de Dory exaspéraient son entourage et le poisson était un personnage à dominante plutôt humoristique. Vécues de l’intérieur ses doutes et surtout sa prise de conscience d’être constamment à côté de la plaque révèlent l’angoisse constante vécue par le poisson bleu. La maladie qui empêche Dory de se souvenir de son passé, mais également de ce qu’elle vient tout juste de dire, la plonge dans un univers en suspens qu’il faut sans cesse reconstruire. Incapable de suivre la discussion, Dory est en permanence isolée, en dehors du temps présent et des interactions sociales. Au-delà de la perte physique, Le monde de Dory explore l’absence de mémoire et d’identité ainsi que le vide terrifiant qui l’accompagne. Dans ce nouveau film, Dory nous fait moins rire mais son combat contre l’oubli la rend encore plus attachante.
Avec une mécanique très proche du film d’origine, Pixar livre une suite qui — à défaut de surprendre — développe intelligemment un personnage qui avait encore beaucoup à dévoiler. Le monde de Dory entraîne nos poissons favoris dans un voyage toujours aussi stimulant, avec un peu plus de profondeur.
> Le monde de Dory (Finding Dory), réalisé par Andrew Stanton et Angus MacLane, États-Unis, 2016 (1h43)