Vous l’avez peut-être vue au journal télévisé, dans des revues spécialisées. La maison conçue par l’agence Karawitz à Bessancourt (95) est la première maison passive d’Ile-de-France. Trois ans après avoir reçu le certificat « maison passive » et investi les lieux, Milena Karanesheva, notre hôtesse, nous éclaire sur ce choix et sur leur mode de vie. Comment se sent-on dans une maison passive ? Comment vit-on sans chauffage ? Ces questions vous taraudent, nous aussi….
Les principes élémentaires
Milena Karanesheva et Mischa Witzmann, architectes, ont décidé de concevoir eux-mêmes leur maison pour accueillir leur famille. Influencés par leur pays d’origine, l’Autriche, où les économies d’énergie et l’habitat sain vont de soi, le couple s’oriente très vite vers la maison passive. « Le concept est très simple, les trois quarts des économies d’énergie sont obtenus grâce à l’enveloppe du bâtiment et la conception reste très libre », précise Milena. Elle considère, en effet, ce mode de construction comme le plus performant. Le principe : une habitation à très basse consommation énergétique basée sur des résultats scientifiques désormais fiables, après 20 ans de recul. « Les maisons passives sont des bâtiments qui assurent un climat intérieur confortable, en été comme en hiver, sans avoir recours à un système conventionnel de chauffage ou de refroidissement. »
Pour y parvenir, il est indispensable de limiter, voire éradiquer, les déperditions, c’est-à-dire tous les courants d’air que vous pouvez sentir chez vous. Mais attention, Milena insiste : « une maison passive est étanche à l’air mais pas hermétique ». L’épaisseur de l’enveloppe (les parois extérieures, la dalle au sol et la toiture de la maison) est calculée en fonction de la température de confort souhaitée. « On calcule les gains solaires, ce que les gens irradient mais aussi la température lorsque l’éclairage, les éléments électriques fonctionnent. Un aspirateur en marche augmente, par exemple, la chaleur dans votre maison. »
Une fois bien isolée par l’extérieur grâce généralement à la ouate de cellulose et/ou de la fibre de bois, la mise en place du triple vitrage, et une implantation appropriée, – « orientée sud, la façade devient votre radiateur » – le test de l’étanchéité à l’air peut avoir lieu. Il s’agit alors de mettre la maison en dépression et en surpression pour calculer la surface de fuites d’air. Les points sensibles – le plus souvent au niveau des portes, des fenêtres, des angles – sont alors traités pour que l’air chaud ne s’échappe pas vers l’extérieur.
Comment y vit-on?
L’image de la maison passive se rapproche pour certains d’une boîte de conserve, mais finies les idées préconçues ! La maison est équipée d’une ventilation dernier cri qui permet un renouvellement constant de l’air intérieur : « l’air se renouvelle une fois toutes les trois heures à 100 % », commente Milena, qui n’y ressent aucune sensation d’enfermement. « On y vit normalement ! », s’amuse-t-elle. Au fur et à mesure, les habitudes changent naturellement. Ils ne s’empêchent pas d’ouvrir les fenêtres au printemps, pour autant, il n’y a plus besoin d’aérer comme dans une maison classique. Les odeurs ne stagnent pas et, pour des individus allergiques, l’air filtré leur convient.
Ils discutent dans leur salon, l’un appuyé sur la baie vitrée, l’autre faisant les cent pas pieds nus sur la dalle en béton brut. « Puisque l’enveloppe est très bien isolée, les parois ne sont jamais froides. » Et l’été, la coursive extérieure de la maison recouverte du bardage en bambous évite toute surchauffe mais laisse filtrer la lumière. Ils ne se posent même plus la question, le confort est constant, homogène dans toute la maison.
Occupants depuis deux ans, ils observent les performances énergétiques de la maison. Conçue un peu comme un test, la maison est également équipée de panneaux solaires thermiques pour l’eau chaude sanitaire et de panneaux solaires photovoltaïques pour l’électricité. Loin d’être négligeable, ils ont divisé par dix le coût de l’énergie global par rapport à un habitat construit selon les normes actuelles. Mais comme dans tout habitat, les matériaux s’usent au fil du temps : si la consommation énergétique augmente, une fuite d’air doit être détectée et traitée. Il est donc nécessaire de rester vigilant pour conserver de réelles économies d’énergie.
Depuis la construction de leur maison, les bâtiments passifs sont devenus, en quelque sorte, leur carte de visite et apparaissent sans cesse en évolution avec des matériaux de plus en plus performants. Mais au-delà de la technique, « la construction passive entre dans un mode de vie globale et chaque projet est différent », souligne l’architecte. Il est donc important de cerner les besoins de chacun, ses goûts, son mode de vie afin que l’architecture remplisse pleinement son rôle.