Je rouille : l’été initiatique d’une adolescence

Je rouille : l’été initiatique d’une adolescence

Je rouille : l’été initiatique d’une adolescence

Je rouille : l’été initiatique d’une adolescence
Rentrée littéraire 2025

18 août 2025

Premier roman de Robin Watine, Je rouille capture l’été comme une saison initiatique, où les premiers émois, les désirs et les humiliations se télescopent. Dans la tête de Noé, adolescent du sud amoureux d’une Parisienne trop lointaine, tout vacille : la virilité, l’amitié, la classe sociale, l’amour. Tout semble possible et déjà voué à s’abîmer. Derrière l’éclat des vacances, que restera-t-il de Noé : l’amour, l’amitié… ou une sensation amère, celle de rouiller sur place ?

Rouiller, ou l’art de stagner

Un titre peut dire beaucoup. « Rouiller », c’est s’oxyder au contact du temps, rester immobile dans un décor qui s’effrite. C’est aussi ce que la belle Léna reproche à Noé, son amour de vacances : de rester coincé dans son sud natal, englué dans une bande de copains dont l’horizon se limite aux petits boulots, à la plage, aux joints et aux potentiels mauvais coups. L’été paraît idyllique, mais derrière le sable chaud, le corps qui bronze et les danses de fin de soirée, une inquiétude sourd : que reste-t-il, quand Léna repartira, quand l’amour de vacances se fane, que tout « rouille » ?

Noé, entre désir et doute

Nous sommes dans la tête de Noé, adolescent du littoral. Le temps d’un été, il s’interroge sur ce qui le définit : sa bande, ses amitiés, ses désirs, et surtout son amour pour Léna, la Parisienne aux parents bourgeois. Son obsession : plaire. « La plupart du temps je suis plutôt occupé à essayer de savoir de quoi j’ai l’air dans ses yeux », avoue-t-il.
Noé devient un homme mais peine à se détacher de l’adolescence. Les injonctions de virilité héritées du milieu où il a grandi s’entrechoquent avec une sensibilité qu’il soupçonne pourtant d’être une force : « J’ai un peu honte de pas être capable de juger autrement qu’à travers les yeux des autres (…) Comme si j’étais un humain de moins bonne qualité. »
Léna n’a pas besoin de lui pour se savoir belle, et pourtant Noé en tire une fierté fébrile : « Tout ça n’a rien à voir avec comment je la trouve jolie, mais plutôt comment ça me rend fier qu’elle le soit. » Jeu des apparences, jeu social : Noé n’est jamais qu’« un mec qui essaye d’en être un autre, et même plein d’autres à la fois. »

Un été qui grince

Dans cette station balnéaire du sud de la France, le brassage social est constant. Les riches touristes côtoient les jeunes du cru, et les différences de classe peuvent devenir insupportables. Lionel rêve de revanche : « C’est nous contre eux », répète-t-il à Noé. Noé oscille : comment devenir soi-même sans trahir ses amis d’enfance ni renoncer à Léna ? Un mauvais coup se prépare, et avec lui une question lancinante : qui Noé reniera-t-il, ses amis, Léna… ou lui-même ?

Les corps, l’été, le manque

Dans Je rouille, tout est moiteur et sensualité : les corps qui se frôlent, qui dansent, qui s’éveillent au désir. Noé voudrait tant donner à Léna un absolu – un orgasme, un « je t’aime » – mais il sent que ses rêves dépassent l’horizon de son été. Elle a une vie ailleurs, à Paris, un autre garçon. Lui voudrait être plus qu’un amour de vacances. La rouille, ici, c’est aussi le désamour : celui de ses parents : « ça avait jamais marché », confesse-t-il, comme si cela expliquait ce doute originel à aimer la vie.

Un roman d’apprentissage sensible

Dans une langue fluide qui épouse le flux de conscience de son narrateur, Robin Watine décrit avec justesse les tourments de l’adolescence : la difficulté à exister sans le regard des autres, la pression du groupe, le vertige des premiers amours. Noé doute, vacille, mais sa fragilité, qu’il pense si singulière, le rend universel.
Dans Je rouille, on retrouve l’insouciance des soirées d’été et l’ivresse des fêtes sur la plage, mais aussi les blessures invisibles et les désirs inassouvis. Comme une mer estivale, le texte alterne calme, houle, profondeur et légèreté.

Touchant, éphémère : deux mots qui décrivent bien ce premier roman sensible, où chacun reconnaîtra quelque chose de ses étés adolescents, entre sable chaud et papillons dans le ventre.

Couverture du livre Je rouille de Robin Watine

Je rouille de Robin Watine

160 pages
Date de publication
20 août 2025
Éditeur
Calmann Lévy
Page du livre sur le site de l’éditeur