Il invente le Fish’n’chips marseillais

Il invente le Fish’n’chips marseillais

Il invente le Fish’n’chips marseillais

Il invente le Fish’n’chips marseillais

26 décembre 2012

Fabien Rugi régale les soirées de la cité phocéenne avec ses cornets locavores.

Il se moque des « chichis panpan », mais il aime bien les concepts. Fabien Rugi, trentenaire hype aux allures de Benigni, aime surtout l’idée de « se régaler à manger des produits de chez nous, le plus simplement possible ». Depuis quelques années, il s’installe dans des soirées, à la sortie des théâtres où il balance ses fishe’n’ships (avé l’accent), version locale et street food du monument de la « gastronomie » anglaise : merlan ou rouget, suivant la saison, et panisses (polenta de pois chiche). Le succès grandissant auprès des cultureux de la cité phocéenne, la logistique devenait compliquée.

« Un soir, on a vraiment beaucoup travaillé à Babel Music, on s’est dit qu’il fallait trouver quelque chose ». Le week-end suivant, en goguette avec sa compagne Shéhérazade, le couple flashe sur un foodtruck vintage. « C’est ça qu’il nous faut », pensent-t-ils alors.

Fabien Rugi, inventeur du Fish'n'ships marseillais. Photo Amélie Riberolle

L’idée était née. La suite ce sont des mois de veille sur leboncoin.com à la recherche du camion de leurs rêves. De galères technico-juridico-administratives , racontées par la belle « Shé », partie prenante du projet, pour en faire un food truck digne de ce nom. Mission accomplie in extremis pour la Foire de Marseille en septembre dernier. Le Citroën tube bleu et jaune enchaîne avec la Fiesta des suds quelques jours plus tard, et sort depuis, presque tous les week-ends. Evénements culturels, prestations privées comme l’arbre de Noël de Ricard: « On fait tout, du branché, du pas branché », explique Fabien l’hyperactif.

Le goût des choses

L’enfant du quartier du Merlan (du Merlan, tout à fait) se félicitait déjà d’avoir créé le concept de « poissonnerie marseillaise » avec sa Boîte à sardine, sise près de l’église des Réformés, tout en haut de la Canebière. Dehors on écaille et on vend (un peu ) ; dedans, on s’entasse autour de tables en inox, pour goûter les produits de la mer cuisinés avec une simplicité revendiquée par Céline, la cuisinère dont le calme offre un contraste saisissant avec la gouaille toute marseillaise de Fabien.

Les foodies et autres amateurs de bonne chère (de poisson) de la cité phocéenne, plébiscitent ce lieu qui, avec une exiguïté forçant encore un peu la convivialité, va parfaitement à notre poissonnier branché. Mais avec ses trente couverts (« serrés comme des sardines » s’amuse Alain, écaillant les rougets au grand air du boulevard de la Libération), l’endroit ne peut contenir l’ambition de Fabien d’offrir « le goût des choses » au plus grand nombre de ses compatriotes marseillais.

Fabien Rugi, inventeur du Fish'n'ships marseillais. Photo Amélie Riberolle

Le fishe’n’ships, puisque c’est ainsi qu’il faut l’écrire, figurait déjà à la carte de la Boîte à sardine quand en cuisine, quelqu’un a lancé « Ben voilà t’as qu’à dire que c’est le fish’n’chips marseillais ! «  Et le réécrire à la sauce marseillaise avé l’accent. L’intitulé parfait était trouvé pour participer à l’événement de Mix en bouche qui avait organisé une soirée « bon son et bon poisson ». Pour ceux qui « aiment bien les chichis panpan »…

Le rêve d’un vrai food truck

S’il est membre de l’association de chefs Gourmediterranée, il se considère avant tout et toujours comme un poissonnier. Qui sait mettre en scène le produit et veut le faire apprécier au plus grand nombre. La street food en est le moyen: « L’autre jour, du haut de mon camion, je regardais les gens, y avait des Blacks, des blancs, des vieux, des jeunes. Ils tripaient tous avec leur cornet ». Un public qui n’aurait pas poussé, ne poussera peut-être pas la porte de la Boîte à sardine. Sauf que « si tu vas à eux, ils aiment et ils apprécient ». Une dimension sociale qui figure parmi les arguments de Fabien pour obtenir un droit de stationnement, comme un vrai food truck (Shéhérazade rêve d’une géolocalisation sur le web à la manière du Camion qui fume à Paris). Dans un paysage marseillais dominé par les camions pizzas, le couple peine à convaincre une mairie traumatisée par les snacks de la Canebière, et sous pression pour Marseille, capitale européenne de la culture en 2013. Alors même que sa trombine s’affiche en 4 par 3 dans toute la ville dans le cadre de la campagne du Mucem (Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée qui doit être inauguré en janvier, NDLR), ce grand escogriffe amoureux de sa ville a décidé de ne pas s’en faire. Il continuera à installer son camion partout où on l’invite (et ça n’arrête pas). « Ils finiront sûrement par comprendre ».