Contis, courts fragments d’un festival

Contis, courts fragments d’un festival

Contis, courts fragments d’un festival

Contis, courts fragments d’un festival

Au cinéma le

Fin juin avait lieu dans les Landes le 18e Festival international de Contis. De la comédie au quasi-expérimental en passant par l'animation ou le drame naturaliste à la française, tout l'éventail du court métrage y était représenté, sous la présidence d'un cinéaste aussi mythique qu'accessible. On est sympa, on rembobine !

Far Ouest

Chaque année, on retrouve avec plaisir Contis-Plage et ses airs de paradis du bout du monde pour le festival international du court métrage. Même quand la température ne dépasse pas les 20° C fin juin (un peu juste pour la baignade) et que la pluie des derniers jours – ou des derniers mois – a transformé les bords des routes en rizières. Sa rue quasi unique descendant en pente douce jusqu’au sable (encore quelques dizaines de mètres et c’est l’Atlantique et ses vagues rugissantes) lui donne des allures de ville du « Far Ouest ». On rêverait d’y tourner un western postmoderne avec des surfeurs dans le rôle des cow-boys.

Plus modestement, la jeune réalisatrice Annarita Zambrano, qui a été en résidence d’écriture dans la petite station balnéaire en 2011, y a filmé deux courts métrages, "Ophelia" et "L’Heure bleue". Projeté lors de la soirée de clôture, le second raconte « l'histoire d'une famille, les parents et leurs deux enfants de 17 et 13 ans, qui passe des vacances à Contis-Plage. Chacun à sa manière dévoile ses sentiments amoureux », selon son producteur Serge Houot. Les lieux où a été tourné ce film fin et drôle se trouvent tous à proximité du cinéma, d’où une impression de familiarité assez étrange. Pour un peu, on s’étonnerait de ne pas s’y voir.

La relève

Scruter les génériques de courts métrages programmés dans un festival permet souvent de repérer de jeunes acteurs qui montent. Comme Bastien Bouillon, présent dans trois films sélectionnés cette année, qui montrent toute l’étendue de son jeu même s’il s’agit essentiellement de seconds rôles. Dans "Rose, maintenant" de Julien Hallard – naturalisme à tendance sociale, pas très passionnant –, il n’a que quelques plans dans lesquels il impose une présence brute, rentrée. Dans le beau "Où je mets ma pudeur" de Sébastien Bailly, il joue le petit ami d’Hafsia Herzi, étudiante en histoire de l’art, et montre une facette plus souriante et gouailleuse.

Mais pas autant que dans "Pour la France" de Shanti Masud, découvert aux Rencontres du moyen métrage de Brive, et qui se bonifie à la deuxième vision. Il y est Charles, amateur de balades nocturnes et de rencontres, clown et funambule, quelque part entre Jean-Pierre Léaud dans les premiers Truffaut et Denis Lavant dans "Boy Meets Girl"de Leos Carax ("Pour la France" est tourné dans un très beau noir et blanc). On souhaite à Bouillon (au nom prédestiné pour jouer dans des courts…) d’aller aussi loin.

Un autre acteur qu’on voit beaucoup et toujours avec plaisir, entre les festivals de Pantin et de Contis et les sorties en salles (La Fille du 14 juillet, La Bataille de Solferino à la rentrée…), c’est Vincent Macaigne, jusqu’ici surtout connu pour ses mises en scène de théâtre saignantes. Avec lui, il y a toujours la tentation de se reposer un peu trop sur son incontestable présence, un écueil que Guillaume Brac avait su éviter dans son excellent moyen métrage "Un monde sans femmes".

Un cran en dessous, mais quand même plutôt réussi, "Le Monde à l’envers" de Sylvain Desclous confronte le temps d’une journée Macaigne, commercial ambitieux, à sa mère caissière jouée par Myriam Boyer. Un film tissé de non-dits, portant un regard juste sur une certaine classe moyenne de province. A défaut d’être le plus surprenant, sans doute l’un des films les plus aboutis de cette édition 2013.

Ossang président !

Cette année, le festival avait trouvé un sacré président du jury en la personne de F.J. Ossang. Cinéaste rare et flibustier, réalisateur de quelques courts et de quatre longs seulement depuis 1984, mais aussi musicien et auteur d’une quinzaine de livres, l’homme n’a pas franchement un look de surfer landais, et les ambiances punk/indus/cold wave qu’il affectionne semblent bien loin des langueurs océanes.

Pour autant, Ossang (c’est un pseudonyme…) n’a rien d’un chevalier à la triste figure ; c’est plutôt un bon vivant, aimant discuter et raconter des anecdotes jusque tard dans la nuit. On ne saurait trop conseiller de découvrir ses films (tous édités en DVD), totalement à part dans le cinéma français.

L’ofni de l’édition 2013

Comme le court “à chute” ou l’animation d’auteur, l’“objet filmique non identifié” est une constante de Contis. Dans cette catégorie, on pourrait citer l’étonnant et très amusant “Ogres niais”, où Bernard Blancan met des mots d’enfants dans la bouche d’acteurs adultes (dont lui-même et Serge Riaboukine).

Mais l’allemand "Wildwechsel" frappait encore plus fort. Synopsis : « Inspiré du conte Sterntaler des frères Grimm mais à rebours, un portrait méditatif et métaphorique d’une ville, réalisé devant les portes de la Banque centrale européenne à Francfort-sur-le-Main » (sic). Vous avez du mal à voir ce que ça donne ? L’abscons résultat à l’écran est en tout cas au-delà de tout ce que vous pourriez imaginer.

De tout, pour tous

Cette année, l’applaudimètre à l’issue de chaque séance avait été abandonné au profit du bulletin de vote, plus efficace et précis. Il était en tout cas intéressant de constater que les films distingués par le public étaient différents de ceux choisis par le jury, le seconds s’avérant plus audacieux formellement, voire radicaux ("Lisières" de Grégoire Colin, l’acteur fétiche de Claire Denis, "Abuztua" du Basque Pello Gutierrez, le très barré "Crossover – La Traversée" d’Olivier Séror).

On s’y attendait un peu avec F.J. Ossang comme président… Ces suffrages divergents témoignaient moins au fond d’un divorce entre grand public et cinéphiles pointus (de toute façon, on vient à Contis sans trop savoir à quoi s’attendre, sinon au plaisir de la découverte) que de l’extrême diversité des cinémas présentés. A tel point qu’il semble difficile d’établir une échelle de valeurs, entre un modeste film d’animation de quelques minutes et une fiction de plus d’une demi-heure signé par un réalisateur déjà expérimenté. Disons simplement que, comme d’habitude, il y avait du bon et du moins bon dans chaque catégorie. Et que le meilleur valait largement le déplacement.

> 2 automnes et 3 hivers, de Sébastien Betbeder réunira Vincent Macaigne et Bastien Bouillon au cinéma, sortie prévue le 30 octobre 2013. 

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