Meghan (Elizabeth Banks), reporter télé, apprend qu’elle vient de passer à côté du poste de ses rêves : présentatrice attitrée du journal. Dépitée, elle se laisse convaincre par deux amies de noyer son désespoir dans l’alcool, moulée dans une « robe de salope » (terme du film) jaune flashy. Après une nuit bien arrosée, elle se retrouve au petit matin dans le lit de Gordon (James Marsden) et apprend en consultant son répondeur qu’elle est finalement toujours en course pour le poste de présentatrice et doit se rendre au studio télé pour un entretien. La jeune journaliste se précipite pour quitter le domicile du charmant inconnu et se retrouve dans la rue, perdue, sans téléphone, voiture, carte d’identité, ni argent. Meghan va alors enchainer les situations improbables, rarement amusantes, dans un (trop) long périple qui devient vite pénible.
Fausse promesse
La première déception de Blackout Total provient de son titre et son affiche qui cherchent à le vendre, en France, comme un Very Bad Trip (2009) au féminin. Grave tromperie sur la marchandise ; contrairement aux losers du fameux film qui ont un réveil (très) difficile, Meghan ne cherche pas longtemps à se remémorer les événements de la veille. Elle a batifolé, assez sagement, avec un inconnu une partie de la nuit, une situation très éloignée des excès dantesques de la trilogie Very Bad Trip et son ton trash assumé. L’humour de Blackout Total, à mi-chemin entre provocation timide et conformisme, est très convenu et certaines blagues, qui auraient pu passer avec un peu de folie, sont juste vulgaires.
Très vite l’ennui s’installe, d’autant plus que rien n’est crédible dans le périple de la jeune journaliste. La tension du film repose sur le fait que la belle n’a que huit heures pour rejoindre son lieu de travail, quel suspens ! Dans ce laps de temps, aucune âme charitable ne souhaite aider la jeune femme, les habitants de Los Angeles sont vraiment des monstres. Plus incroyable encore, alors que son visage est dans le journal et s’affiche même sur des bus, personne, à part un fumeur de crack, ne reconnait la journaliste qui passe à la télé. Des incohérences qui vont de paire avec un personnage trop superficiel qui peine à attirer la compassion. Elizabeth Banks a beau en faire des tonnes, on a du mal à se passionner pour son aventure.
Toutes des putes
Au-delà de l’ennui provoqué par les situations improbables et les dialogues poussifs, tout le film repose sur un seul ressort comique qui finit par devenir gênant. Lorsque la journaliste s’éclipse de chez Gordon, elle se retrouve au petit matin, moulée dans sa robe jaune poussin, parmi un groupe de prostituées. On peut alors comprendre le malentendu qui l’assimile à ces travailleuses du sexe. Le fait que deux policiers menacent de l’embarquer, sans qu’elle puisse s’expliquer, est déjà moins crédible mais passons, la comédie exige des personnages stupides et excessifs. Cela devient embarrassant quand l’amalgame « une fille habillée sexy est une pute » est partagé par toutes les personnes qu’elle va croiser lors de son calvaire. Sauf une qui remarque que la robe est trop chère pour être celle d’une prostituée. Lorsque Meghan rejoint (enfin) son studio, une prise de conscience qui sauverait l’honneur du film est espérée mais son discours nombriliste est bien décevant. Le film rate l’occasion de dénoncer le quiproquo sexiste sur lequel il a pourtant basé toute son intrigue et valide, de fait, l’attitude très discutable de ceux qui ont croisé la route de la jeune femme.
Improbable du début à la fin, Blackout Total manque cruellement d’originalité et de folie. Plus gênant, l’épopée est entièrement basée sur un amalgame sexiste récurrent qui n’est jamais clairement dénoncé. Une comédie insipide, aussi navrante sur le fond que sur la forme, à fuir sans hésitation.
> Blackout Total (Walk of Shame), réalisé par Steven Brill, États-Unis, 2014 (1h35)