Amour et rock’n’roll

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Au cinéma le

Que les fleurs bleues se réjouissent, il y a de l'amour sur les écrans cette semaine. Hétéro, homo, en perruque poudrée ou en Dr. Martens...

 

Les Adieux à la reine

14 juillet 1789. Lorsque la caméra de Benoît Jacquot surprend Sidonie Laborde à son réveil, la lectrice de Marie-Antoinette ignore que la Cour va bientôt plonger dans le tumulte et que, dans quelques jours, sa vie sera bouleversée à jamais. Les Adieux à la reine[fn]Les Adieux à la reine, réalisé par Benoit Jacquot, France, 2011 (1h40).[/fn] a des allures de reportage à Versailles, la caméra glissant sous les ors du château, furetant dans les sous-sols, en même temps qu’elle suit Sidonie. La jeune femme affiche un dévouement sans faille à la reine, qu’alimente un mélange d’admiration, de respect et sans doute, d’amour.

Le film ne donne pas à voir davantage que ce dont Sidonie est susceptible d’être témoin, il n’en dit pas plus que ce qu’elle peut connaître des événements qui agitent Paris et la Cour, aussi, même si le spectateur peut appréhender l’intrigue au regard de ses connaissances historiques, Benoît Jacquot se borne à épouser le point de vue de son héroïne. La rumeur apprend à Sidonie que Marie-Antoinette et Gabrielle de Polignac entretiendraient une relation particulière. Un peu plus tard, elle saisira de manière indiscrète une conversation intime entre les deux femmes qui confirmera les bruits de Cour. Mais jamais Benoît Jacquot ne montre explicitement la nature exacte de cette relation. La polémique qui entoure le film – la Coordination de défense de Versailles hurle au « déni de l’Histoire » – est des plus veines.

Les Adieux à la reine doit moins être considéré comme un film historique que comme une œuvre de fantasmes. Dans tous les sens du terme. Aux fantasmes charnels qui semblent agiter Sidonie, s’ajoutent la convoitise de l’aisance matérielle des privilégiés (l’horloge que garde la jeune lectrice dans sa chambre pour quelques jours en est le symbole) et la jalousie trouble qu’elle éprouve envers Gabrielle de Polignac. Certaines scènes encore pourraient relever du songe. On se demande d’ailleurs si elles n’ont pas été rêvées. D’où une impression d’étrangeté que soulignent les silhouettes fantomatiques errant dans les couloirs, comme si elles avaient quitté ce monde (c’est bien de la fin d’un monde dont il s’agit ici). De cette tempête intime, de ce flottement historique, le film extrait toute sa puissance. 

Bellflower

Bellflower[fn]Bellflower, réalisé par Evan Glodell, Etats-Unis, 2011 (1h46).[/fn], c’est un autre type de déflagration et un autre genre d’atmosphère apocalyptique, mais il est toujours question d’amour et de fantasme. Woodrow et Aiden, deux potes, vingtenaires et un brin paumés, n’ont d’autre ambition que de confectionner un lance-flammes et de customiser une voiture, surnommée « Medusa », en bolide de guerre. Biberonnés à Mad Max, ils ont fait de Lord Humungus leur maître à penser. Un soir, Woodrow fait la connaissance d’une jolie blonde, Connie, et va mettre son projet entre parenthèses pour prendre la route avec elle. Direction le Texas.

Le premier film d’Evan Glodell (qui incarne aussi Woodrow) est de ceux qui imposent le respect. Les qualités d’une œuvre ne doivent pas être mesurées à l’aune de son budget mais force est de constater que Bellflower a de la gueule et une excellente tenue sachant qu’il a été tourné pour à peine 17 000 dollars. Il serait tout aussi réducteur de le considérer uniquement comme un film de potes talentueux ou, pire, un phénomène indé/arty/hype (rayez les mentions inutiles). Couleurs saturées, flous délibérés, plans salis par le sable ou la poussière : Bellflower assume une identité visuelle qui lui confère une ambiance irréelle.

Glodell ne s’attarde pas sur la route du mumblecore et trouve lui-même son chemin, faisant entendre une voix plus singulière et personnelle, pour s’aventurer vers le cinéma de genre. Avec ce ton bien particulier, il nous dit que les blessures amoureuses ont un goût de fin du monde. Et qu’aimer la pyrotechnie n’empêche pas d’être un grand sensible.

Bye Bye Blondie

La comédie romantique grand public est un genre des plus hétéro-normés. Il est donc plutôt rafraîchissant de voir Virginie Despentes l’aborder sous l’angle "lesbienne punk". Soit l’histoire de Gloria et Frances, qui se retrouvent vingt ans après s’être rencontrées dans un hôpital psychiatrique puis aimées au rythme des Béru et de La Souris déglinguée. Gloria (Béatrice Dalle), habituée à vivoter et à fuir le monde du travail, s’installe dans l’appartement parisien que Frances (Emmanuelle Béart), star du PAF, partage avec son mari, Claude (Pascal Greggory), écrivain gay en panne d’inspiration. Bye Bye Blondie[fn]Bye Bye Blondie, réalisé par Virginie Despentes, France/Belgique/Suisse, 2011 (1h37).[/fn] n’a rien d’un vaudeville et ne joue pas vraiment du contraste entre les deux "mondes" que représentent Gloria et Frances.

Virginie Despentes préfère la carte plus tendre, laissant l’humour surgir au détour d’une réplique – Pascal Greggory en prononce de savoureuses – ou d’une situation incongrue. Dans les nombreux flashbacks, elle relate la genèse de cet amour secoué par l’énergie punk des 80’s. Il y a un plaisir évident à observer le couple Dalle-Béart (ensemble à l’écran pour la première fois) se déformer et se reformer mais le duo Soko-Clara Ponsot récupère bien plus que des miettes. Le film est bancal, mais finalement parfaitement à l’image de l’histoire de son couple principal. Bye Bye Blondie et imparfait mais attachant, presque un feel good movie. Ne pas renier ses idéaux de jeunesse et être soi-même : si c’était ça, être punk, en 2012 ?

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