2012, il ne doit en rester que 12

2012, il ne doit en rester que 12

2012, il ne doit en rester que 12

2012, il ne doit en rester que 12

18 décembre 2012

A chaque période ses marronniers, ça, chaque journaliste le sait. Quand on est dans une période molle et qu'on préfère aller faire un squash que rester vissé sur sa chaise, genre dans des mois tristes de banalités comme octobre ou mars, on fait des couv' sur les francs-maçons ou l'immobilier. Mais en fin d'année, il y a toujours un poncif auquel il faut se plier, les top disques, top livres, top films… Et puis comme pour un prix Nobel, on les attribue de manière politico-diplomatique, parce qu'on ne va pas rester sur des bouderies. Mais nous à Citazine, on est différents, car des idées nous on en a des tonnes. Ouais nous, hé bien on ne fait pas un Top10 mais un Top 12 (tiens, prends ça dans les dents Télérama). Mais autant prévenir tout de suite, ce bilan est un peu morose. Très peu de ces albums m'ont follement convaincus, à l'instar des sorties des Shins, Animal Collective et Why ? qui m'ont carrément déçu. Mais bon, en des temps où des magazines spécialisés font leur une sur Shaka Ponk et Skip The Use, il n'est pas inutile de rappeler les bons albums que cette année nous a offerts.

12. TOY – Toy. L’album des jeunots qui n’ont pas connu le Hit Machine 

 
Mais qu’ils connaissent leur My Bloody Valentine et leur House of Love sur le bout des doigts, ça c’est certain. Dans le revival shoegaze des nineties, les cinq membres de Toy sont les plus beaux apôtres de 2012. Le seul truc qui me chiffone, c’est que ce sont des potes de The Horrors.
 

11. THE WALKMEN – Heaven. L’album qui te fait saloper ta salle de bains parce que tu chantes les refrains en même temps que tu te brosses les dents

 
 
Enfin, ça le fait surtout sur "The Love You Love" avec lequel il est scientifiquement impossible de ne pas répéter le refrain en concert avec Hamilton Leithauser. Pour ceux qui ne connaissent pas les Walkmen, qui en sont déjà à leur sixième album, Hamilton Leithauser c’est un peu la voix de Julian Casablancas avec la classe de Matt Berninger. Avec The Heaven, Les Walkmen poursuivent donc leur petit bonhomme de chemin avec du classique rock sans fioritures et autres bidouillage. Du rock quoi… et du bon. 
 
 
10. HERE WE GO MAGIC – A Different Ship. L’album que t’as envie de défendre car tu veux repasser la session que tu as enregistrée car elle n’a même pas fait 100 vues sur youtube.
 
 
Saperlipopette quoi, on était tout content de filmer Luke Temple, même fiérot qu’il utilise une de nos guitares et puis bam le bide sur youtube. Un peu comme quand tu fais un super gâteau (j’imagine) et que tu n’as pas le droit à « hey donne moi la recette ».
 
Ici Hard To Be Close.
 
 
 

9. SHARON VAN ETTEN – Tramp. Le seul album avec une fille dedans pour respecter des quotas à la Yves Calvi.

 
 
Adoubée par Aaron Dessner (The National), Zach Condon (Beirut), Sufjan Stevens ou encore Kyp Malone (TV on the radio), on peut dire que Sharon Van Etten est plus que bien entourée. Adepte d’un folk aux mélodies simples et limpides, les morceaux de Van Etten respirent la sincérité et donnent une intensité formidable à son folk sobre et épuré. 
 

 

8. EVENING HYMNS – Spectral Dusk. L’album du barbu qui vit dans une cabane.

 
 
 
Sorti chez le label des Clermontois de Kütu Folks, "Spectral Dusk" est le troisième album de Jonas Bonnetta, auteur dorénavant de la scène de Toronto. Pas évident de trouver une place dans cette foisonnante scène de Toronto (Timber Timbre, Broken Social Scene etc), mais les mélodies de Jonas Bonnetta sont assez délicates et touchantes pour qu’elles se fassent repérer. Avec le mélancolique "Arrow" ou l’indie "Cabin in The Burn", "Spectral Dusk" était l’album de cet automne.
 
 
 
7. DINOSAUR Jr – I Bet On Sky. L’album qui dit c’était le bon temps les 90’s, c’est pas comme maintenant.
 
 
Rares sont les dinosaures du rock (ah ah ah) à pouvoir revenir aussi fort que dans leur folle jeunesse. Dinosaur Jr en fait partie et confirme avec "I Bet on Sky" que ce power trio en a encore lourd sous la pédale. Qu’il est bon de s’offrir la voix traînante de Mascis et qu’il est bon d’entendre Barlow en pleine inspiration. Petite (grosse ?) nouveauté, Dinosaur Jr s’est mis aux claviers et ça fonctionne à merveille avec "Don’t Pretend You Didn’t Know". Pas de révolution, juste une évolution qui convient mieux aux tempos un peu plus lents qu’auparavant. Une belle réussite qui fait donc en plus saliver sur les productions annoncées des revenants de Sebadoh (autre projet du bassiste Barlow).
 

6. BEAK> – >>. L’album intello qui fait aussi classe que de citer un philosophe allemand

 
 
Petit rappel,  Beak > est un des projets de Geoff Barrow (Portishead). Et si sur Third, Portishead s’était partiellement aventuré dans les contrées sombres du Krautrock, avec Beak>, Barrow plonge en plein dedans. Il y a de ces genres rock qui aujourd’hui posent un respect silencieux. Placez simplement le mot Krautrock dans une conversation et vous passerez pour quelqu’un qui s’y connaît, à qui on ne la lui fait pas. Rythmiques répétitives, envolées d’orgues, chants criards ou d’outre-tombe, ambiance dépouillée où il est bon de ne pas exprimer de sentiments trop positifs, tous les ingrédients sont là. Sublimé par un son épuré, cet album de Beak> réussit son coup.
 

5. ALT- J- An Awesome Wave. L’album qui va te faire passer pour un hipster mais tant pis

 
 
 
Oui je vous vois venir là,  "ouais super Alt-J, genre monsieur aime les petits popeux qui font du buzz ". Hé bien oui, j’ai été touché par les ritournelles du groupe de Leeds. Oui on pourrait leur reprocher que leur Awesome Wave surfe bien sur la mode des rythmiques tribales, reggae pour blanc et trifouillages électro. Et si la voix élastique de Joe Newman ne vous rebute pas, il est quand même agréable de se laisser happer par des titres comme "Tessellate" ou "Matilda" (que sans doute Yoni Wolf crèverait d’écrire aujourd’hui).
 
En plus on les a interviewés et ils portent drôlement bien le short :
 

 

4. ARNAUD MICHNIAK – Pour qui sonne le tilt. L’album du gars que t’as toujours adoré comme un gourou et qui fait penser à ton entourage que tu es dépressif.

 
 
 
S’il y en a bien un autre qui a réussi sa mue, c’est bien Arnaud Michniak. Il faut croire que la reformation de Diabologum a fait autant de bien à Michel Cloup qu’à Michniak. Avec "Poing Perdu", on le sentait un peu tourner à vide dans son nihilisme, avec "Agent réel", le toulousain continuait à aboyer contre "la Banalité du mal". Sur "Pour qui sonne le tilt", le chant est plus posé. On a l’impression que cette colère est toujours présente mais jugulée, que finalement tout est une affaire de distance et de temps comme il le chante dans le titre éponyme. Il n’en demeure pas moins que Michniak pose toujours les bonnes questions préférant désormais jouer avec ses plaies plutôt que d’appuyer dessus.
 

3. GRIZZLY BEAR – Shields. L’album que t’es un peu obligé de mettre dans un top 12, c’est un peu comme dire que t’aimes bien Radiohead.

 
 
 
Tu risques de passer pour un sacré poseur si tu passes à côté de cet album. Et puis il faut avouer que les New Yorkais ont pour une fois tenter de faire un album plus direct. "Shields" est plus puissant que "Veckatimest", attaque plus au corps. Grizzly Bear nous étonne même avec "Yet Again", d’une efficacité rock incontestable et "What’s Wrong" est l’exemple type d’un morceau de Grizzly Bear réussi, qui avec des structures complexes arrive à donner un résultat beau et simple. Passer à côté de cet album serait donc une grosse erreur
 
 

2. BEACH HOUSE – BLOOM. L’album que tu trouves moins bien que le précédent mais c’est surtout que le précédent était super bien.

 
 
 
Généralement quand tu parles de cet album, 9 fois sur 10 ton interlocuteur (source IFOP) te dira "ah il est bien mais moins que le précédent". La vraie question est donc : "est-il vraiment moins bon ?" Malheureusement la réponse est oui. Bloom est très loin d’être mauvais mais il a perdu une des forces de "Teen Dream", à savoir son habillage sonore. Moins évanescent, "Bloom" happe moins l’auditeur. Mais Beach House est encore capable de façonner des titres aussi merveilleux que "Wild" ou "Troublemaker". Moins hypnotisé mais encore sous le charme, je le place néanmoins en deuxième position.
 
 

1. ISLANDS – A Sleep & Forgetting. L’album du groupe dont t’avais plus envie d’entendre parler alors que le dernier vaut vachement le coup.

 
 
 
Et c’est finalement cet album qui m’a le plus convaincu. Pourtant c’est avec une certaine lassitude que j’avais commencé à écouter le dernier opus des Islands. Il faut dire que les trois premiers albums (surtout le troisième) avaient de quoi laisser pantois. Nick Thornburn en faisait trop et pouvait noyer des tueries pop ("Don’t Call Me Whitney, Bobby") dans une pop grassouillette. Thornburn a quitté Montréal pour Los Angeles et bien lui en a pris.
Abandonnant ces mélodies enrobées d’une sauce trop huileuse, Thornburn s’est glissé en songwriter classique et élégant. Capable de créer des brûlots irrésistibles comme "Hallways" autant des ballades raffinées tels que le dandy "Lonely Love", Islands effectue la plus belle mue de l’année.