2010, il ne doit en rester que 10…

2010, il ne doit en rester que 10…

2010, il ne doit en rester que 10…

2010, il ne doit en rester que 10…

28 décembre 2010

Bilan musical, que de crimes a-t-on commis en ton nom ! Combien de groupes fauchés en pleine jeunesse pour un bon mot du rédacteur ? Combien d'artistes oubliés sur l'autel de la postérité ? Parce qu'on est aussi vilains que tout le monde, on s'exécute froidement, sans humilité et sans pudeur dans un papier avec pleins de noms de groupes dedans.

Préambule lâche : Paradoxalement, en écoutant beaucoup (trop) d’albums, on oublie d’écouter les héros d’antan (Programme, Adam Green, James Mercer avec Broken Bells), on se déçoit peut-être trop rapidement des deuxièmes albums moins percutants (Yeasayer, Vampire Weekend), on zappe les rééditions qu’on réclamait pourtant depuis longtemps (Giant Steps des Boo Radleys), on écoute vite fait par politesse les artistes adorés dont le vernis a craqué (Belle & Sebastian, Blonde Redhead, Interpol) ; et puis, arrivé à la synthèse de ce que l’on a eu la chance d’entendre, il faut bien faire des choix (exit Lightspeed Champion, Local Natives, Menomena, etc.) pour sélectionner le fameux Top 10.

1 – Et c’est donc

Beach House

qui remporte, pour moi, la palme de l’album le plus mélancoliquement réjouissant de l’année. Il aura fallu trois albums pour que les ritournelles mid-tempo du duo atteignent une envergure éloquente. Teen Dream[fn]Beach House, Teen Dream, Sub Pop.[/fn] est composé de morceaux puissants et minimalistes sur lesquels les guitares diaphanes d’Alex Scally "pichenettent" les nappes de clavier et le chant cotonneux, chaud et profond de Victoria Legrand. Indispensable.

2 – Suivent les valeureux membres de

The National

dont certains critiqueront la continuité un brin pépère du quintet. Pourtant High Violet [fn]The National, High Violet, 4AD Records.[/fn] est sûrement l’album le plus abouti, le plus fluide des New Yorkais. Mais maintenant que le groupe connaît une certaine audience, il est de bon ton de dire, « c’était mieux avant »… Moi, la seule critique que j’ai à leur adresser, c’est qu’ils ont gâché un moment fort attendu : la tournée des revenants de Pavement. C’est vêtu d’un t-shirt taille fillette du groupe de Stockton que j’ai assisté à l’outrage. Malgré un son plus qu’handicapant, la bande de Matt Berninger effectua un set diablement meilleur que la bande à Malkmus.

3 – Le retour electro vintage de

Sufjan Stevens

a encore bien plus divisé. Que n’a-t-on pas entendu sur l’Américain ? Sufjan Stevens se serait perdu. Bon dieu non ! The Age Of Adz [fn]Sufjan Stevens, The Age Of Adz, Asthmatic Kitty.[/fn] est un monument de ces dix dernières années ! C’est à la fois épuré, grandiloquent, inventif, courageux, harmonieux ! Mais j’ai quand même un problème douloureux avec cet album. C’est que Stevens a mis son banjo au piquet pour The Age of Adz pile poil le jour où j’achetais un banjolélé. Forcément, je l’ai pris pour moi, un peu comme quand Platini s’est mis à la bière lorsque j’ai commencé à boire du Fruité.

4 – Comment ne pas prendre un coup de vieux avec les jeunots de

Tame Impala

. Volontairement ou non, ces Australiens appliquent des sonorités psyché lo-fi sur des substances ultra pop. Les mélodies de Kevin Parker, tête pensante du combo, pigmentées de multiples riffs et de fuzz ne lassent ainsi rarement l’auditeur, le laissant dans un état hypnotique tout au long de ce premier opus, chouettement dénommé Innerspeaker [fn]Tame Impala, Innerspeaker, Modular.[/fn].

5 – Avec Splash [fn]Jeremy Jay, Splash, K Records / Differ-ant.[/fn],

Jeremy Jay

s’est voulu plus électrique, atténuant l’aspect très new wave du précédent Slow Dance. Bien propulsé par son micro tube Just Dial My Number, ce dandy dégingandé se faufile entre les références les plus élogieuses (Morrissey, Pavement, Jonathan Richman) pour offrir un album d’une maîtrise rare.

6 – Et on poursuit avec l’échappée en solitaire de Jónsi (chanteur de Sigur Rós) qui, avec l’album Go [fn]Jónsi, Go, XL Recordings.[/fn] et dans la continuité de Gobbledigook, poursuit ses mélodies pop aériennes et saisissantes. Et puis ça fait classe de mettre un Islandais dans un Top 10, je trouve. Cela fait maintenant cinq ans que je mets un Islandais dans mon classement et je me porte comme un charme.

7 – Born Ruffians rentre dans le panthéon alors qu’il a été un peu descendu par Pitchfork. Ce qui est un sacrilège, c’est un peu comme aimer un film orné du petit bonhomme énervé de Télérama. Pourtant, Say It [fn]Born Ruffians, Say It, Warp Records.[/fn], le deuxième album de ces Canadiens, est irrésistible grâce à une formule bouillonnante à la fois encadrée et détraquée.

8 – Avec Swim [fn]Caribou, Swim, Merge / City Slang.[/fn], son cinquième album, Dan Snaith (aka

Caribou

) rend, une fois encore, une copie parfaite en nous offrant une démonstration d’électro-pop épurée irrésistible. Les constructions sont ultra travaillées mais le résultat est resplendissant de simplicité. Sur des rythmes claquants, inondés de boucles en constante évolution, la voix mélancolique de Snaith se pose en douceur.

9 – Le dernier album de

Deerhunter

, Halcyon Digest [fn]Deerhunter, Halcyon Digest, 4AD Records / Kranky.[/fn], fait plus penser à l’expérience solo de Bradford Cox avec Atlas Sounds que des précédents albums du combo d’Atlanta. Se composant de morceaux catchy et fluides, dont les constructions pop laissent une fausse impression de bidouillage, Halcyon Digest est un album rafraîchissant qui annonce sans doute le son des années 2010.

10 – Alors que Wavves annoncent plutôt le retour du grunge jouissif. Le roi de la plage [fn]Wavves, King of the Beach, Fatpossum / Bella Union.[/fn] est bien plus rigolo que ces baudruches de Girls qui se sont gonflées dans un emballement médiatique dont personne ne voulait être mis à l’écart… Nathan Williams sabote savamment et crassement ses mélodies wilsoniennes en se la jouant loser branleur. Yeah.

Chaque Top 10 est meilleur que celui du voisin donc, par essence, voué à la critique… A vos plumes, donc !