Rudy Ricciotti, architecte en béton brut

Rudy Ricciotti, architecte en béton brut

Rudy Ricciotti, architecte en béton brut

Rudy Ricciotti, architecte en béton brut

12 avril 2013

Lyrique, entier, provocateur, Rudy Ricciotti, chantre d'une architecture maniérée, travaillée par une main d'oeuvre locale et ancrée dans un paysage, s'expose à la Cité de l'architecture, à Paris.

Département des arts de l'Islam du musée du Louvre, Paris l Philippe Ruault

Ici, toucher n'est pas interdit : vous êtes même priés de le faire. La résine en aluminium du toit du nouveau bâtiment des arts de l'Islam, au Louvre, ou encore la matrice de bois pour la réalisation d'un moule du Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerannée (Mucem) à Marseille. Loin des seuls plans et images de synthèse, l'exposition Ricciotti, architecte montre tout, même les dessous, même le cheminement des premières esquisses aux solutions techniques pour faire tenir debout le bâtiment.

Contre "l'intégrisme architectural"

L'exposition montre tout, un peu comme Rudy Ricciotti, architecte un brin provocateur, qui ne fait pas dans la demi-mesure, n'hésitant pas à dénoncer "l'intégrisme architectural". "Les salafistes et les architectes pourraient avoir en commun la même haine de la figure. Une haine de la figure singulière, criant haro sur le mouton qui aurait eu le malheur d'envisager d'aller se faire tondre ailleurs, de vivre et de construire différemment. Un contexte d'intimidation véritablement hégémonique finissant par rendre impossible l'émergence d'autres façons de bâtir, de penser et de dire les lieux".

Mucem, Marseille l Lisa Ricctiotti

Souvent lyrique aussi, jusque dans ses coups de gueule dont on se souvient généralement. Le minimalisme ? "Inventé par les Américains, il fait un tabac dans les classes sociales éduquées. La prise de bénéfice rapide en est l'explication". Les normes environnementales dans la construction ? Il en a carrément fait un pamphlet titré "HQE : les renards du temple", dans lequel il ne mâche pas ses mots à l'égard de ceux qui ont rhabillé de "fourrure verte" leurs bâtiments, au lieu de regarder vers les savoir-faire locaux.

Matière et sensualité

Car le local, il y tient. Pour chaque projet, Rudy Ricciotti dessine ses idées avant de partir à la rencontre des artisans vivant autour du lieu d'implantation, afin de réfléchir à la manière de mettre en oeuvre son bâtiment avec la chaîne de production la plus courte possible. "Mes projets sont de plus en plus complexes, ils impliquent des métiers, des compagnons, des ingénieurs. Et que tous ensemble soyons tirés vers le haut".

Musée Cocteau, Menton l Eric Delière

C'est peut-être aussi sa double formation d'architecte et d'ingénieur qui le pousse dans ses recherches expérimentales avec les savoir-faire locaux, la matière, l'enveloppe. Comme avec le béton, ce matériau qui "peut inspirer l'effroi dans certaines banlieues et ailleurs toucher au sublime" dit-il. L'exposition retrace les grands projets, remportés ou pas, par l'architecte, du musée Cocteau de Menton au Pont du diable à Gignac, en passant par le stade Jean Bouin à Paris. Entre la matière et les images, on observe une série d'aquarelles de l'artiste Yves Salomone, qui suit le travail de Rudy Ricciotti depuis une vingtaine d'année. Ainsi que le regard de cinéaste de Laetitia Masson sur cet architecte de combat. "Quand Ricciotti construit un bâtiment, on n’est plus dans la mode, dans le design, ce n’est pas du Prada", dit-elle. "Rien n’y est décoratif. Toute la sensualité réside dans la matière."

Centre Iter, Manosque l Lisa Ricciotti

> A voir :

Ricciotti, architecte

, jusqu'au 8 septembre 2013 à la Cité de l'architecture et du patrimoine, 1 place du Trocadéo, Paris.

> A lire :

L'architecture est un sport de combat

, Rudy Ricciotti. Editions Textuel.

Pont du diable, Gignac l Laurent Boudereaux