Rose et Demanche font des listes

Rose et Demanche font des listes

Rose et Demanche font des listes

Rose et Demanche font des listes

28 novembre 2012

Nul n'ignore désormais que les grandes cérémonies des Césars, ou des Oscars, ont leur versant humoristique depuis 2006. Avec leurs "Gérard", du cinéma ou de la télévision, Arnaud Demanche, Stéphane Rose et Frédéric Royer récompensent chaque année les plus mauvais films et acteurs, ou bien programmes et animateurs de la télévision française. Que font-ils le reste de l'année ? Concernant les deux premiers notamment, un "Grand Livre des Listes". L'occasion pour Citazine de leur adresser une petite liste de questions.

Arnaud Demanche et Stéphane Rose. Photo DR

Ensemble ils sont auteurs et interprètes des Gérard du cinéma, auteurs de livres pour enfants, de textes pour Nicolas Canteloup… Arnaud Demanche et Stéphane Rose sont de ces caméléons capables de se glisser dans n’importe quelle brèche, à partir du moment où le projet fait appel à leur créativité, notamment humoristique, qu’il s’agisse d’écriture, de radio ou de télévision. En effet, Stéphane Rose est de son côté directeur de collection et attaché de presse pour la maison d’édition érotique La Musardine, activité qu’il n’estime pas incompatible avec sa qualité d’auteur de livres pour enfants d’ailleurs, mais aussi journaliste à ses heures (il est notamment très fier d’avoir écrit pour le magazine Jeune et Jolie). Arnaud Demanche est quant à lui, auteur pour la télévision et chroniqueur radio (il a notamment travaillé pour France Inter).

Bref, les deux trublions des Gérard n’en finissent plus de voir s’allonger la liste de leurs activités professionnelles. Et les listes, ils semblent aimer ça, puisque qu’ils viennent de publier leur Grand Livre des Listes.

Objet difficilement identifiable, l’ouvrage est un ramassis de listes plus improbables les unes que les autres : de choses plus constructives à faire que de lire ce livre, de mots qui ne sont jamais tatoués sur les bras des gens, des recettes aux recettes, des façons horripilantes de signer un mail, des manifestations de l’hystérie féminine, des positions sexuelles non recensées par le Kâmasutra… Ou encore, la liste des prénoms constitutifs du prénom Jean-Marc. (!)

Stéphane Rose. Photo DR

Les auteurs détaillent tout de même – il faut bien assurer sa promotion -, quelques bonnes raisons d’acheter leur création. Parmi elles : lutter contre… le chômage. Les auteurs s’expliquent, non sans user d’une flatterie suspecte : « Nous l’avons écrit pour permettre à de jeunes journalistes pleines d’avenir comme vous d’exercer leur métier, et donc de gagner leur vie, en nous posant des questions », argue Stéphane Rose. Et Arnaud Demanche de compléter : « Sans compter les bénéfices inouïs pour tous nos amis de l’édition, de la presse, du graphisme et les vendeurs Fnac de toute la planète, à qui vendre ce livre va permettre de se nourrir au moins une semaine ! Merci qui ? »

L’imposture humanitaire

Autre bonne raison invoquée par les auteurs : 50% des bénéfices seraient reversés à une association investie dans la création d’un orphelinat au Mali… Tellement difficile à croire, qu’il était impossible de ne pas demander confirmation. Et en effet, Arnaud Demanche rétropédale : « En fait, renseignements pris, il paraît qu’il n’y a plus d’orphelins au Mali. Désolé, c’était une belle idée, mais on nous a mal rencardé. »

Oscillant entre absurde et provocation, ponctué d’auto-dérision latente, de transgressions légères mais non moins gênantes, et de jeux de mots tirés par les cheveux, leur style est à la fois indescriptible et déconcertant. Impossible de ranger les fondateurs des Gérard dans des cases… notamment politiques. Et si tout le monde en prend régulièrement pour son grade, dans cet ouvrage ce sont surtout l’UMP et les communistes qui sont pris pour cibles. Seraient-ils socialistes ? « Je ne suis ni de droite ni de gauche, se défend Stéphane Rose. Donc de droite me répond-on souvent, ce dont je me tamponne avec la dernière énergie. » Même positionnement pour son compère : « En général, je tiens volontairement des propos de droite avec les gens de gauche, et des propos de gauche avec les gens de droite. D’une façon générale, je vais me placer en contradiction avec mon interlocuteur juste pour le plaisir de débattre. Le bouquin est un peu comme ça, il y a des tas de choses ‘sur lesquelles on ne doit pas plaisanter’, donc, évidemment, ce sont nos premières cibles. »

Arnaud Demanche. Photo DR

La liste des questions 

On sent un fond un peu misogyne dans vos blagues… du moins, revanchard. Vous attaquez souvent les femmes et plus rarement les hommes. Je vous mets donc au défi de faire deux listes…

… d’au moins 5 défauts typiquement masculins :

Stéphane :
1. Les hommes manquent d’humilité (quand ils disent qu’ils ont plus d’humour que les filles, même si c’est vrai)
2. Les hommes manquent de fair play (quand ils ne laissent pas gagner les filles aux épreuves sportives, qu’elles perdent tout le temps car elles sont moins fortes que les garçons de par leur constitution faible)
3. Les hommes manquent d’ouverture d’esprit (quand ils refusent d’écouter les disques chiants que leurs copines veulent à tout prix partager avec eux)
4. Les hommes manquent de patience (quand ils confient le plan de la ville à leurs copines qui les égarent donc invariablement en raison de l’absence de sens de l’orientation qui caractérise les femmes)
5. Les hommes manquent de self control (en s’énervant un peu facilement quand, dans le cadre d’une discussion contradictoires, les femmes usent des arguments de mauvaise foi propres à leur genre)

… d’au moins 5 qualités typiquement féminines :

Stéphane : 1. Leurs seins. 2. Leurs fesses. 3. Leurs bouches. 4. Leurs petites chatounettes épilées (ou non)[fn]"Les petites chatounettes", et leurs poils, un sujet auquel Stéphane Rose a consacré un livre, La défense du poil. [/fn] 5. Les escarpins à talons de 15 cm.

Arnaud : Quoique je réponde, je fusillerai la vanne de Stéphane, ça serait dommage. Ceci dit, je réfute toute accusation de misogynie. On vanne tout un tas de comportements masculins dans nos listes. Simplement, c’est moins drôle de le faire avec des hommes, parce qu’il n’y a pas d’associations masculinistes qui viennent ensuite vociférer sous nos fenêtres. Alors que faire tourner en bourrique une féministe casse-couilles, c’est toujours un plaisir.

En lien avec la question précédente, avez-vous un problème avec les hystériques ? Lequel ? Et d’ailleurs, je vous mets au défi d’élaborer votre définition de l’hystérique, et de faire une liste des qualités de celle-ci.

Stéphane : Défi échoué, j’avoue.

Arnaud : Une hystérique, c’est une femme qui donne même envie aux femmes de faire des blagues sur les femmes.

Dans la liste d’endroits où il ne faut selon vous pas mettre les doigts, vous citez : un hachoir à viande, ce qui semble évident, et un… « vagin piégé », ce qui l’est moins. Serait-il possible d’obtenir quelques explications, voire un retour d’expérience ?

Arnaud : Un mauvais trip sous LSD. Comme beaucoup d’autres choses dans le livre, et que nous… Eh, y a un chou-fleur !

Arnaud Demanche et Stéphane Rose. Photo DR

Je vous défie, après la très longue liste de bonnes raisons de "se bourrer la gueule", de trouver de mauvaises raisons de le faire :

Stéphane : Car le corps est le temple qui héberge le joyau cosmique de l’esprit et dont il faut entretenir les fondations.

Arnaud : D’ailleurs, le corps nécessite d’être purifié par de l’eau de source, dont le voyage dans notre organisme débarrasse celui-ci des impuretés négativistes qui bouchent nos shakras et empêchent le rayonnement cosmiciviste.

I

l y a dans votre livre une liste de hontes. Quel serait votre Top 3 personnel ?

Stéphane : Je n’arrive pas à répondre à cette question. J’ai beaucoup de mal à ressentir "une grande honte". En revanche j’ai constaté que mes proches avaient souvent honte pour moi, c’est donc peut-être mes amis qu’il faudrait questionner pour savoir…

Arnaud : J’ai deux / trois souvenirs assez humiliants de chroniques dans une émission ratée de Paris Première, dans une configuration totalement improbable pour des humoristes. Je suis content qu’aucune trace vidéo ne subsiste de ce naufrage mémorable. Je me souviens aussi m’être décomposé en apprenant 5 minutes avant une chronique face à François Hollande, que j’avais anglé sur son couple avec Royal, qu’ils s’étaient séparés officieusement deux ou trois jours avant. J’ai eu l’air hyper con. J’ai aussi eu l’air hyper con face à Montebourg, Buffet et Noël Mamère. Et puis on ne peut pas dire que je chérisse le jour où je me suis fait griller en train de dessiner des meufs à poil dans mon livre de vocabulaire d’allemand.

« Le Grand Livre des Listes », Arnaud Demanche et Stéphane Rose, Editions Michalon, Novembre 2012.