Jaune, la couleur du crime

Jaune, la couleur du crime

Jaune, la couleur du crime

Jaune, la couleur du crime

Au cinéma le

Les gialli, ces films policiers italiens lorgnant vers le cinéma d'horreur, ont connu leur âge d'or dans les années 1970. Gros plan sur un genre méconnu en France.

Les têtes pensantes qui, au sein des éditions italiennes Mondadori, ont décidé, à la fin des années 1920, que les romans policiers seraient publiés sous une couverture jaune, ont-elles imaginé que cette couleur (« giallo ») s’imposerait, dans le langage courant pour désigner la littérature criminelle ? Sans doute pas davantage qu’elles se seraient figuré qu’une quarantaine d’années plus tard, elle s’étendrait à un genre cinématographique. Ou plutôt un sous-genre puisqu’il s’agit d’une déclinaison du film policier, aux confins de l’horreur et, parfois, du fantastique, remplissant des critères précis.
Ainsi, un giallo met généralement en scène un tueur en série particulièrement sadique, aux mains gantées de cuir noir. Les victimes, le plus souvent de sexe féminin, succombent par strangulation ou sous les coups d’une arme blanche. L’option « gorge tranchée par un morceau de verre brisé », assez courante, peut également être retenue. Côté décors, mieux vaut préférer les atmosphères baroques, les enfilades de couloirs et les recoins sombres. Concernant les éclairages, il est recommandé de ne pas rechercher le naturalisme à tout prix. Ne pas oublier non plus un soupçon d’érotisme. Voici pour les caractéristiques autour desquelles s’accordent les amateurs du genre.
Mais il existe bien des motifs de discorde, sources intarissables de discussion sur les forums internet. A commencer par la naissance du giallo dont la paternité est attribuée à Mario Bava, mais qui, selon les sensibilités, coïncide avec la sortie de « La fille qui en savait trop » sur les écrans italiens en 1963. D’autres citent « Le téléphone » (avec Michèle Mercier au casting), premier segment du film à sketches, « Les trois visages de la peur » distribué la même année, et certains soutiennent que le premier jalon a été posé en 1964 avec « Six femmes pour l’assassin ». Quoiqu’il en soit, l’âge d’or du giallo aura véritablement duré une quinzaine d’années -du milieu des années 1960 à la fin des années 1970, mais demeure relativement méconnu en France aujourd’hui, en dehors des œuvres de Mario Bava et Dario Argento.

Pourtant, l’influence de ces films d’exploitation n’a pas manqué de traverser l’Atlantique. Ainsi, les slashers, ces films dans lesquels un tueur masqué occit des bandes d’étudiant(e)s (« Black christmas » [fn] de Glen Morgan. [/fn] , « Halloween » [fn] de John Carpenter. [/fn], « Vendredi 13 » [fn] de Marcus Nispel. [/fn] , « Scream » [fn] de Wes Craven. [/fn] …) leur doit beaucoup. Quentin Tarantino, illustre bouffeur de cinéma de genre, cite aussi « Les trois visages de la peur » comme source d’inspiration principale pour « Pulp fiction ». Certains films, à l’instar de « The Collector » (de Marc Dunstan), sorti directement en DVD cet été, sont présentés comme des néo-gialli ; dans le cas de ce film, c’est la perversité des stratagèmes mis en place par le tueur pour exécuter ses victimes qui lorgnent du côté du giallo…

Autre exemple plus flagrant : « Amer », sorti -trop- discrètement sur les écrans français en mars dernier, qui sera édité en DVD le 27 octobre [fn] DVD édité chez Wild Side. [/fn]. Ce premier film du duo franco-belge Hélène Cattet/Bruno Forzani, n’est pas un giallo à proprement parler mais plutôt un exercice de style fétichiste où les codes du genre sont utilisés pour esquisser le portrait intime d’une femme et son rapport, entre autres, à la sexualité. Une vraie expérience de spectateur, des plus réjouissantes et fascinantes pour peu que l’on accepte de se laisser (em)porter par la puissance évocatrice des images.

Les deux réalisateurs ont déjà le projet d’un nouveau film et annoncent un long-métrage plus proche d’un  »vrai » giallo, avec une enquête policière. Il devrait sortir sur les écrans bien avant… « Giallo » de Dario Argento. Alors qu’il a été tourné il y a deux ans -Adrian Brody et Emmanuelle Seignier sont au générique-, aucune date de distribution n’a été annoncée en France. L’affaire semble donc plutôt compromise. En attendant, le père d’Asia Argento sera passé au festival Lumière de Lyon, début octobre où cinq de ses gialli ont été présentés : « L’oiseau au plumage de cristal », « Le chat à neuf queues », « Ténèbres », « Suspiria » et « Phenomena ». Ils sortiront en DVD dans la foulée [fn] Sortie prévue le 3 novembre dans la collection « Les introuvable » chez Wild Side. [/fn], l’occasion ou jamais pour les néophytes de se familiariser avec le genre.

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